ÉVÉNEMENTS ET SÉANCES SPECIALES

A PROPOS
À l’attention des fans de la période la plus géniale de Woody Allen, il faut imaginer une comédie qui emprunterait à la fois à Meurtres mystérieux à Manhattan (pour les spéculations débridées autour d’un possible meurtre), Une autre femme (pour le portrait en profondeur d’une psychanalyste sexagénaire et stricte en pleine crise) et Alice (pour la traversée des miroirs d’une héroïne en vadrouille). Rien que ça ? C’est la bonne surprise de Vie privée, présenté hors compétition au Festival de Cannes : une profusion de références reflétant le désir de Rebecca Zlotowski de signer un film tel qu’elle aimerait sans doute en voir un…
Et avec une interprète vénérée, pour qui la cinéaste a conçu un personnage comme toutes les actrices en rêvent : sans cesse à l’image, en mouvement, en réflexion, à la recherche — d’indices, de clés, de remèdes, de raisons. Non seulement Jodie Foster (pour la première fois dans un grand rôle tout en français) étincelle avec cette partition, mais elle apporte aussi, implicitement, la touche américaine vintage qui fait parfois ressembler Paris au New York d’il y a quelques décennies, le grain de l’image et la direction artistique aidant.
L’incident déclencheur, la mort suspecte d’une patiente (Virginie Efira), conduit la thérapeute, qui se voulait neutre, impassible, professionnelle, à franchir toutes sortes de limites, pour surmonter sa culpabilité (serait-elle responsable, indirectement ou non, du décès ?), mais pas seulement. Une boîte de Pandore s’ouvre, un vent de folie pas toujours douce se lève, qui fait couler, mystérieusement et non-stop, les yeux de la psy, la précipite, dans le désordre, chez son ex-mari ophtalmo (Daniel Auteuil, délicieux) ou chez son fils sévère (Vincent Lacoste, idem). C’est, bien sûr, au sujet d’elle-même qu’elle finit par enquêter, et sous hypnose, s’il le faut. Les découvertes ne manquent pas de sel, en termes d’identité, d’orientation sexuelle ou de perception d’autrui — cette vision du fils en milicien pro-nazi !
Même si Matthieu Amalric excelle aussi en grand méchant présumé (le mari de la défunte patiente), la piste criminelle, ou accidentelle, ou autre, se laisse donc oublier, au profit d’un Cluedo intime, des plus ludiques. Le parcours initiatique est jalonné de répliques cinglantes et, en dernière analyse, joyeuses. Il s’agit pour l’héroïne d’apprendre à « avancer dans le noir », d’accepter la perte de contrôle et de certitudes. Et pour tout le monde, spectateurs compris, de ne jamais oublier qu’on est au cinéma, lieu, comme le divan de la psy, de bien des catharsis.
Louis Guichard (Télérama)
Cap ciné
vendredi 28 novembre
à 20h30
Séance en audiodescription avec sous-titrages pour malentendants
VIE PRIVÉE
de Rebecca Zlotowski
Avec Jodie Foster, Daniel Auteuil, Virginie Efira
France - 2025 - 1h43 - Cannes 2025
Lilian Steiner est une psychiatre reconnue. Quand elle apprend la mort de l'une de ses patientes, elle se persuade qu'il s'agit d'un meurtre. Troublée, elle décide de mener son enquête.
https://www.advitamdistribution.com/films/vie-privee/
A PROPOS
À l’attention des fans de la période la plus géniale de Woody Allen, il faut imaginer une comédie qui emprunterait à la fois à Meurtres mystérieux à Manhattan (pour les spéculations débridées autour d’un possible meurtre), Une autre femme (pour le portrait en profondeur d’une psychanalyste sexagénaire et stricte en pleine crise) et Alice (pour la traversée des miroirs d’une héroïne en vadrouille). Rien que ça ? C’est la bonne surprise de Vie privée, présenté hors compétition au Festival de Cannes : une profusion de références reflétant le désir de Rebecca Zlotowski de signer un film tel qu’elle aimerait sans doute en voir un…
Et avec une interprète vénérée, pour qui la cinéaste a conçu un personnage comme toutes les actrices en rêvent : sans cesse à l’image, en mouvement, en réflexion, à la recherche — d’indices, de clés, de remèdes, de raisons. Non seulement Jodie Foster (pour la première fois dans un grand rôle tout en français) étincelle avec cette partition, mais elle apporte aussi, implicitement, la touche américaine vintage qui fait parfois ressembler Paris au New York d’il y a quelques décennies, le grain de l’image et la direction artistique aidant.
L’incident déclencheur, la mort suspecte d’une patiente (Virginie Efira), conduit la thérapeute, qui se voulait neutre, impassible, professionnelle, à franchir toutes sortes de limites, pour surmonter sa culpabilité (serait-elle responsable, indirectement ou non, du décès ?), mais pas seulement. Une boîte de Pandore s’ouvre, un vent de folie pas toujours douce se lève, qui fait couler, mystérieusement et non-stop, les yeux de la psy, la précipite, dans le désordre, chez son ex-mari ophtalmo (Daniel Auteuil, délicieux) ou chez son fils sévère (Vincent Lacoste, idem). C’est, bien sûr, au sujet d’elle-même qu’elle finit par enquêter, et sous hypnose, s’il le faut. Les découvertes ne manquent pas de sel, en termes d’identité, d’orientation sexuelle ou de perception d’autrui — cette vision du fils en milicien pro-nazi !
Même si Matthieu Amalric excelle aussi en grand méchant présumé (le mari de la défunte patiente), la piste criminelle, ou accidentelle, ou autre, se laisse donc oublier, au profit d’un Cluedo intime, des plus ludiques. Le parcours initiatique est jalonné de répliques cinglantes et, en dernière analyse, joyeuses. Il s’agit pour l’héroïne d’apprendre à « avancer dans le noir », d’accepter la perte de contrôle et de certitudes. Et pour tout le monde, spectateurs compris, de ne jamais oublier qu’on est au cinéma, lieu, comme le divan de la psy, de bien des catharsis.
Louis Guichard (Télérama)

