ÉVÉNEMENTS ET SÉANCES SPECIALES

A PROPOS
Plongée dans les conflits intimes d’une Irlande populaire déchirée et ambivalente.
Présenté en compétition officielle lors du Festival de Cannes 2014, Jimmy’s Hall, du propre aveu de Ken Loach, est sans doute son film ultime. Une dernière fois, Loach apporte une nouvelle pierre à l’édifice politique qu’il a patiemment construit, notamment dans ses films historiques : les rares victoires des forces populaires (ouvrières, paysannes) leur ont toujours été volées par une gauche centriste attirée par le seul pouvoir.
C’était déjà le sujet du Vent se lève, le film qui lui valut la Palme d’or en 2006, où Loach montrait que les nouveaux maîtres de l’Irlande (en gros, les dirigeants de l’IRA), après l’indépendance de 1922, avaient utilisé les même méthodes que les Anglais pour mater les extrêmes.
C’était aussi celui, dans un autre pays, de Land and Freedom (1995), où Loach rendait responsables les communistes espagnols des luttes intestines et sanglantes avec les anarchistes qui avaient entraîné la défaite des forces républicaines pendant la guerre d’Espagne de 1936.
Dans Jimmy’s Hall, l’action se déroule à nouveau en Irlande, en 1932, dans le comté de Leitrim. Une salle de danse, sorte de patronage ou de centre culturel avant l’heure, devient l’enjeu d’un conflit. D’un côté, l’évêque, qui y voit un lieu de débauche, de “communisme” et surtout d’acculturation qui risquerait de menacer la mainmise du catholicisme sur la population. De l’autre, le propriétaire et fondateur du lieu, Jimmy Gralton (Barry Ward), un activiste de retour au pays pour s’occuper de sa mère et de leur ferme (l’histoire est inspirée de faits réels), après dix ans d’exil aux Etats-Unis.
Or le gouvernement, par intérêt, a fait alliance avec l’Eglise et les propriétaires terriens et voit ce conflit d’un mauvais œil. Jimmy (et Ken Loach…) va réveiller et concentrer toutes les contradictions de l’Etat irlandais.
Comme souvent dans les films historiques de Loach, la direction d’acteurs est assez figée, les dialogues très didactiques. Mais au milieu de ce théâtre un peu engoncé, le film prend vie à plusieurs occasions. D’abord dans les séances de danse et de musique (jazz et folk irlandais – que l’Eglise réprouvait alors). Et puis dans cette scène bouleversante où la mère de Jimmy Gralton propose du thé aux policiers venus arrêter et expulser une nouvelle fois son fils du pays.
Elle les connaît tous depuis qu’ils sont nés. La suite prouvera que l’hospitalité de la vieille dame était très retorse, mais cette scène à elle seule sent le vrai, l’intime, la réalité d’un peuple où les liens affectifs peuvent être très ambivalents entre les membres d’une communauté tiraillée depuis des siècles. On retrouve dans ces moments le Loach qu’on a toujours aimé. Nous lui souhaitons longue vie.
Jean-Baptiste Morain - Les Inrockuptibles
Cinélégende
lundi 1 décembre
à 20h00
Exils - Mal du pays
Présentation et débat en présence de Louis Mathieu, Cinéma Parlant
Séance organisée en collaboration avec l'association Cinélégende et l'association Cinéma Parlant
JIMMY'S HALL
de Ken Loach
avec Barry Ward, Simone Kirby, Jim Norton
Angleterre - 2014 - 1h46 - VOST
1932 - Après un exil de 10 ans aux États-Unis, Jimmy Gralton rentre au pays pour aider sa mère à s'occuper de la ferme familiale.
L'Irlande qu'il retrouve, une dizaine d'années après la guerre civile, s'est dotée d'un nouveau gouvernement. Tous les espoirs sont permis…
Suite aux sollicitations des jeunes du Comté de Leitrim, Jimmy, malgré sa réticence à provoquer ses vieux ennemis comme l'Eglise ou les propriétaires terriens, décide de rouvrir le "Hall", un foyer ouvert à tous où l'on se retrouve pour danser, étudier, ou discuter. À nouveau, le succès est immédiat. Mais l'influence grandissante de Jimmy et ses idées progressistes ne sont toujours pas du goût de tout le monde au village. Les tensions refont surface.
https://www.facebook.com/JimmysHallFilm?fref=ts
A PROPOS
Plongée dans les conflits intimes d’une Irlande populaire déchirée et ambivalente.
Présenté en compétition officielle lors du Festival de Cannes 2014, Jimmy’s Hall, du propre aveu de Ken Loach, est sans doute son film ultime. Une dernière fois, Loach apporte une nouvelle pierre à l’édifice politique qu’il a patiemment construit, notamment dans ses films historiques : les rares victoires des forces populaires (ouvrières, paysannes) leur ont toujours été volées par une gauche centriste attirée par le seul pouvoir.
C’était déjà le sujet du Vent se lève, le film qui lui valut la Palme d’or en 2006, où Loach montrait que les nouveaux maîtres de l’Irlande (en gros, les dirigeants de l’IRA), après l’indépendance de 1922, avaient utilisé les même méthodes que les Anglais pour mater les extrêmes.
C’était aussi celui, dans un autre pays, de Land and Freedom (1995), où Loach rendait responsables les communistes espagnols des luttes intestines et sanglantes avec les anarchistes qui avaient entraîné la défaite des forces républicaines pendant la guerre d’Espagne de 1936.
Dans Jimmy’s Hall, l’action se déroule à nouveau en Irlande, en 1932, dans le comté de Leitrim. Une salle de danse, sorte de patronage ou de centre culturel avant l’heure, devient l’enjeu d’un conflit. D’un côté, l’évêque, qui y voit un lieu de débauche, de “communisme” et surtout d’acculturation qui risquerait de menacer la mainmise du catholicisme sur la population. De l’autre, le propriétaire et fondateur du lieu, Jimmy Gralton (Barry Ward), un activiste de retour au pays pour s’occuper de sa mère et de leur ferme (l’histoire est inspirée de faits réels), après dix ans d’exil aux Etats-Unis.
Or le gouvernement, par intérêt, a fait alliance avec l’Eglise et les propriétaires terriens et voit ce conflit d’un mauvais œil. Jimmy (et Ken Loach…) va réveiller et concentrer toutes les contradictions de l’Etat irlandais.
Comme souvent dans les films historiques de Loach, la direction d’acteurs est assez figée, les dialogues très didactiques. Mais au milieu de ce théâtre un peu engoncé, le film prend vie à plusieurs occasions. D’abord dans les séances de danse et de musique (jazz et folk irlandais – que l’Eglise réprouvait alors). Et puis dans cette scène bouleversante où la mère de Jimmy Gralton propose du thé aux policiers venus arrêter et expulser une nouvelle fois son fils du pays.
Elle les connaît tous depuis qu’ils sont nés. La suite prouvera que l’hospitalité de la vieille dame était très retorse, mais cette scène à elle seule sent le vrai, l’intime, la réalité d’un peuple où les liens affectifs peuvent être très ambivalents entre les membres d’une communauté tiraillée depuis des siècles. On retrouve dans ces moments le Loach qu’on a toujours aimé. Nous lui souhaitons longue vie.
Jean-Baptiste Morain - Les Inrockuptibles