THE LIGHTHOUSE - Robert Eggers

A PROPOS

Lorsque The Lighthouse débute, ses deux héros ont les traits déjà exsangues. Voilà qui donne le ton du combat de boxe auquel nous convie l’Américain Robert Eggers, révélé par son formidable film d’horreur The Witch, et qui nous livre une fois encore ici un sacré morceau. Les deux longs métrages sont assez différents ; la sensibilité de The Witch diffère de la brutalité de The Lighthouse, le premier film était porté par une progression minutieuse jusqu’à un finale stupéfiant là où le second appuie très rapidement à fond sur la pédale d’accélération sans relâcher la pression. C’est une des limites de The Lighthouse qui est guetté par la répétition, c’est aussi une force qui rend régulièrement le film étourdissant et nous laisse au bord du KO.

S’il y a une chose qui réunit The Witch et The Lighthouse, c’est la façon d’aborder le fantastique. Il est dans les deux films une question de point de vue, une observation méticuleuse de ce moment où la raison peut vaciller avant que des manifestations merveilleuses n’apparaissent réellement à l’écran. L’étrange dans The Lighthouse s’invite d’abord par des rêves ou des trous dans le mur. Il y a le décor aussi : The Witch jouait sur la peur archétypale inspirée par les bois, et Eggers filmait les branches et arbres déracinés comme des occurrences monstrueuses. Le phare de son nouveau film n’est rien qu’un phare, mais il est regardé comme un monde parallèle lovecraftien, c’est une étrange lumière dans une nuit infernale, menacée par des vagues noires et des orages terribles. Le bizarre s’invite et les mouettes comme hier les boucs semblent avoir quelque chose à nous dire.

Tourné en 35mm avec la collaboration de Jarin Blaschke qui avait déjà fait merveille sur The Witch, le film est d’une grande beauté – notamment par son travail sur la lumière qui joue ici un vrai rôle narratif. The Lighthouse est peuplé de visions baroques qui laissent bouche bée. L’atmosphère tempétueuse ajoute au climat halluciné du long métrage, le mugissement des cornes de brume succèdent aux sinistres chœurs féminins de The Witch et Willem Dafoe est looké comme les woodsmen cauchemardesques de la saison 3 de Twin Peaks. Dafoe comme Pattinson sont tous les deux incroyables, livrant des prestations à la fois hantées et bouffonnes. Le film est à leur image : parfois épuisant, mais d’une intensité inouïe. On a ici le sentiment de découvrir un conte oublié et dont les visions grandioses et aveuglantes resurgissent comme celles d’un mauvais rêve.

Nicolas Bardot (Le polyester.com)

Avant-première
lundi 9 décembre 2019 à 19h45

Soirée organisée en collaboration avec Cinéma Parlant dans le cadre de la semaine de cinéma de langue anglaise


THE LIGHTHOUSE

de Robert Eggers

avec Willem Dafoe, Robert Pattinson
USA - CANADA - 2019 - 1h50 - VOST - Interdit aux moins de 12 ans - Cannes 2019 - Prix du Jury Deauville 2019

Deux hommes, un vieux briscard et un jeune mutique, arrivent dans un phare très isolé. Ils sont en poste pour quatre semaines au milieu de la brume. Dans cette atmosphère humide, des évènements étranges commencent à se produire…

A PROPOS

Lorsque The Lighthouse débute, ses deux héros ont les traits déjà exsangues. Voilà qui donne le ton du combat de boxe auquel nous convie l’Américain Robert Eggers, révélé par son formidable film d’horreur The Witch, et qui nous livre une fois encore ici un sacré morceau. Les deux longs métrages sont assez différents ; la sensibilité de The Witch diffère de la brutalité de The Lighthouse, le premier film était porté par une progression minutieuse jusqu’à un finale stupéfiant là où le second appuie très rapidement à fond sur la pédale d’accélération sans relâcher la pression. C’est une des limites de The Lighthouse qui est guetté par la répétition, c’est aussi une force qui rend régulièrement le film étourdissant et nous laisse au bord du KO.

S’il y a une chose qui réunit The Witch et The Lighthouse, c’est la façon d’aborder le fantastique. Il est dans les deux films une question de point de vue, une observation méticuleuse de ce moment où la raison peut vaciller avant que des manifestations merveilleuses n’apparaissent réellement à l’écran. L’étrange dans The Lighthouse s’invite d’abord par des rêves ou des trous dans le mur. Il y a le décor aussi : The Witch jouait sur la peur archétypale inspirée par les bois, et Eggers filmait les branches et arbres déracinés comme des occurrences monstrueuses. Le phare de son nouveau film n’est rien qu’un phare, mais il est regardé comme un monde parallèle lovecraftien, c’est une étrange lumière dans une nuit infernale, menacée par des vagues noires et des orages terribles. Le bizarre s’invite et les mouettes comme hier les boucs semblent avoir quelque chose à nous dire.

Tourné en 35mm avec la collaboration de Jarin Blaschke qui avait déjà fait merveille sur The Witch, le film est d’une grande beauté – notamment par son travail sur la lumière qui joue ici un vrai rôle narratif. The Lighthouse est peuplé de visions baroques qui laissent bouche bée. L’atmosphère tempétueuse ajoute au climat halluciné du long métrage, le mugissement des cornes de brume succèdent aux sinistres chœurs féminins de The Witch et Willem Dafoe est looké comme les woodsmen cauchemardesques de la saison 3 de Twin Peaks. Dafoe comme Pattinson sont tous les deux incroyables, livrant des prestations à la fois hantées et bouffonnes. Le film est à leur image : parfois épuisant, mais d’une intensité inouïe. On a ici le sentiment de découvrir un conte oublié et dont les visions grandioses et aveuglantes resurgissent comme celles d’un mauvais rêve.

Nicolas Bardot (Le polyester.com)