ÉVÉNEMENTS ET SÉANCES SPECIALES

TOUT LE MONDE AIME JEANNE - Céline Devaux

A PROPOS

Présenté à la Semaine de la Critique, le premier long-métrage de Céline Devaux – Tout le monde aime Jeanne – (re)dore le blason (abîmé) de la comédie romantique en prouvant qu’il est possible d’en faire un écrin féministe à la modernité renversante.
Faire une comédie romantique réussie n’est pas chose facile. Comment, en effet, éviter les sempiternels clichés de l’homme (sauveur) et de la jeune femme (en mal d’amour). Difficile d’échapper aux normes narratives et visuelles marquées par le traditionnel sceau du male gaze. « A cœur vaillant rien d’impossible » dit-on. Céline Devaux fait sienne cette expression toute faite. Tout le monde aime Jeanne prouve qu’il existe des rom’coms drôles, intelligentes et subtiles. Ces trois adjectifs ne sauraient caractériser la richesse d’une œuvre qui refuse les catégorisations.
Tout le monde aime Jeanne oscille, en effet, entre comédie romantique et drame (familial). Céline Devaux se plaît à brouiller les frontières. Le film emprunte à différentes genres (cinématographiques) tout en s’éloignant des stéréotypes de genre (encore en vigueur dans nombre de comédies romantiques). Jeanne (Blanche Gardin) est une cheffe d’entreprise pleine d’avenir. Son projet en faveur de la protection des océans devrait faire d’elle la « femme de l’année ».
Problème : le concept ne prend pas, faute d’investisseurs suffisants. Menacée par les créanciers, la jeune femme se retrouve alors contrainte de vendre l’appartement légué par sa mère, qui vivait au Portugal. Jeanne s’envole illico presto à Lisbonne dans l’espoir de liquider rapidement l’héritage maternel. Ce synopsis, à première vue, plutôt banal prend une tout autre couleur à l’écran. Car, il est un détail (capital) que nous nous avons omis de préciser.
Tout le monde aime Jeanne n’est une comédie romantique comme les autres. Céline Devaux entrecoupe la narration par des plans animés (qu’elle a d’ailleurs elle-même dessinés) qui ajoutent, voire accentuent la drôlerie des situations. Ce dessin animé constitue, en somme, la figuration de la conscience de Jeanne. Le public peut, ainsi, en temps réel, découvrir les pensées (interdites) de l’héroïne. Le dispositif engage une réflexion salutaire via le rire qu’il suscite. Les petits bonhommes aux cheveux longs qui peuplent la tête de Jeanne renvoient à toutes les pensées intrusives, culpabilisantes, cyniques et (parfois) bienveillantes que nous échangeons avec nous-même.
Céline Devaux donne corps aux fantasmes de son héroïne. Nous sommes à mille lieues des comédies romantiques classiques où l’intériorité du personnage féminin est (bien souvent) à peine abordée par les cinéastes (masculins). La collusion (retrouvée) entre dedans et dehors renforce le lien entre le public et le personnage. Nous sommes dans la tête de Jeanne. Nous sommes au plus près de ce qu’elle ressent. Les situations auxquelles elle est confrontée entrent en résonnance avec les propres expériences du public.
Si Tout le monde aime Jeanne s’apprécie sans modération, c’est aussi en raison de ses truculents seconds rôles. Citons dans l’ordre Jean (Laurent Lafitte) et Vitor (Nuno Lopes) et Simon (Maxence Tual) qui incarnent respectivement les rôles de l’amoureux, de l’ancien amant et du frère de Jeanne. Céline Devaux s’écarte du classique triangle amoureux à la Mary à tout prix (1997). Convoitée, Jeanne n’est, cependant, ni sexualisée ni envisagée comme un objet de bataille entre deux coqs qui voudraient gonfler leurs tableaux de chasse.
A l’instar des comédies romantiques classiques, le rire définit, chez Céline Devaux, la relation amoureuse naissante. La réalisatrice évite, toutefois, l’erreur d’en faire un faire-valoir qui exclurait la parole du personnage féminin. Céline Devaux (s’)impose avec Tout le monde aime Jeanne comme la cinéaste de demain. Avec son style cinématographique inédit, mêlant réalité et fiction, animé et inanimé, la cinéaste ouvre une fenêtre sur l’intériorité d’un personnage de femme aux prises avec un monde dense, aux confins du passé et de l’avenir, du deuil et de l’amour. Une véritable réussite !
Berenice Thevenet (lemagducine.fr)

Avant-première
mercredi 24 août 2022 à 20h00

Séance présentée et suivie d'une rencontre avec Céline Devaux

Le film a été présenté cette année à Cannes, à la Semaine de la Critique.
Auparavant, Céline Devaux est venue à trois reprises présenter ses courts métrages d’animation : Vie et mort de l’illustre Grigori Efimovitch Raspoutine, qui a reçu le Grand prix du jury en 2013, Le Repas dominical (2016) et Gros chagrin (2018). Elle a été membre du jury des courts métrages en 2018


Soirée organisée en partenariat avec le Festival Premiers Plans


TOUT LE MONDE AIME JEANNE

de Céline Devaux

avec Blanche Gardin, Laurent Lafitte, Maxence Tual
FRANCE - 2022 - 1h35 - Cannes 2022

Tout le monde a toujours aimé Jeanne. Aujourd’hui, elle se déteste. Surendettée, elle doit se rendre à Lisbonne et mettre en vente l’appartement de sa mère disparue un an auparavant. A l’aéroport elle tombe sur Jean, un ancien camarade de lycée fantasque et quelque peu envahissant.

http://diaphana.fr/film/tout-le-monde-aime-jeanne/

A PROPOS

Présenté à la Semaine de la Critique, le premier long-métrage de Céline Devaux – Tout le monde aime Jeanne – (re)dore le blason (abîmé) de la comédie romantique en prouvant qu’il est possible d’en faire un écrin féministe à la modernité renversante.
Faire une comédie romantique réussie n’est pas chose facile. Comment, en effet, éviter les sempiternels clichés de l’homme (sauveur) et de la jeune femme (en mal d’amour). Difficile d’échapper aux normes narratives et visuelles marquées par le traditionnel sceau du male gaze. « A cœur vaillant rien d’impossible » dit-on. Céline Devaux fait sienne cette expression toute faite. Tout le monde aime Jeanne prouve qu’il existe des rom’coms drôles, intelligentes et subtiles. Ces trois adjectifs ne sauraient caractériser la richesse d’une œuvre qui refuse les catégorisations.
Tout le monde aime Jeanne oscille, en effet, entre comédie romantique et drame (familial). Céline Devaux se plaît à brouiller les frontières. Le film emprunte à différentes genres (cinématographiques) tout en s’éloignant des stéréotypes de genre (encore en vigueur dans nombre de comédies romantiques). Jeanne (Blanche Gardin) est une cheffe d’entreprise pleine d’avenir. Son projet en faveur de la protection des océans devrait faire d’elle la « femme de l’année ».
Problème : le concept ne prend pas, faute d’investisseurs suffisants. Menacée par les créanciers, la jeune femme se retrouve alors contrainte de vendre l’appartement légué par sa mère, qui vivait au Portugal. Jeanne s’envole illico presto à Lisbonne dans l’espoir de liquider rapidement l’héritage maternel. Ce synopsis, à première vue, plutôt banal prend une tout autre couleur à l’écran. Car, il est un détail (capital) que nous nous avons omis de préciser.
Tout le monde aime Jeanne n’est une comédie romantique comme les autres. Céline Devaux entrecoupe la narration par des plans animés (qu’elle a d’ailleurs elle-même dessinés) qui ajoutent, voire accentuent la drôlerie des situations. Ce dessin animé constitue, en somme, la figuration de la conscience de Jeanne. Le public peut, ainsi, en temps réel, découvrir les pensées (interdites) de l’héroïne. Le dispositif engage une réflexion salutaire via le rire qu’il suscite. Les petits bonhommes aux cheveux longs qui peuplent la tête de Jeanne renvoient à toutes les pensées intrusives, culpabilisantes, cyniques et (parfois) bienveillantes que nous échangeons avec nous-même.
Céline Devaux donne corps aux fantasmes de son héroïne. Nous sommes à mille lieues des comédies romantiques classiques où l’intériorité du personnage féminin est (bien souvent) à peine abordée par les cinéastes (masculins). La collusion (retrouvée) entre dedans et dehors renforce le lien entre le public et le personnage. Nous sommes dans la tête de Jeanne. Nous sommes au plus près de ce qu’elle ressent. Les situations auxquelles elle est confrontée entrent en résonnance avec les propres expériences du public.
Si Tout le monde aime Jeanne s’apprécie sans modération, c’est aussi en raison de ses truculents seconds rôles. Citons dans l’ordre Jean (Laurent Lafitte) et Vitor (Nuno Lopes) et Simon (Maxence Tual) qui incarnent respectivement les rôles de l’amoureux, de l’ancien amant et du frère de Jeanne. Céline Devaux s’écarte du classique triangle amoureux à la Mary à tout prix (1997). Convoitée, Jeanne n’est, cependant, ni sexualisée ni envisagée comme un objet de bataille entre deux coqs qui voudraient gonfler leurs tableaux de chasse.
A l’instar des comédies romantiques classiques, le rire définit, chez Céline Devaux, la relation amoureuse naissante. La réalisatrice évite, toutefois, l’erreur d’en faire un faire-valoir qui exclurait la parole du personnage féminin. Céline Devaux (s’)impose avec Tout le monde aime Jeanne comme la cinéaste de demain. Avec son style cinématographique inédit, mêlant réalité et fiction, animé et inanimé, la cinéaste ouvre une fenêtre sur l’intériorité d’un personnage de femme aux prises avec un monde dense, aux confins du passé et de l’avenir, du deuil et de l’amour. Une véritable réussite !
Berenice Thevenet (lemagducine.fr)