ÉVÉNEMENTS ET SÉANCES SPECIALES

LE RÉPONDEUR - Soirée Rencontre - 2025-06-10

Soirée Rencontre - mardi 10 juin à 20h00

LE RÉPONDEUR de Fabienne Godet

SAUVE QUI PEUT - Ciné Doc - 2025-06-12

Ciné Doc - jeudi 12 juin à 20h00

SAUVE QUI PEUT de Alexe Poukine

SOUDAN, SOUVIENS-TOI - Ciné Doc - 2025-06-16

Ciné Doc - lundi 16 juin à 20h00

SOUDAN, SOUVIENS-TOI de Hind Meddeb

DE CHAQUE INSTANT - Ciné Doc - 2025-06-23

Ciné Doc - lundi 23 juin à 20h00

DE CHAQUE INSTANT de Nicolas Philibert

VALEUR SENTIMENTALE - Avant Première - 2025-06-26

Avant Première - jeudi 26 juin à 20h15

VALEUR SENTIMENTALE de Joachim Trier

ENZO - Ciné Cosy - 2025-06-27

Ciné Cosy - vendredi 27 juin à 13h15

ENZO de Laurent Cantet & Robin Campillo

TROIS SOUVENIRS DE MA JEUNESSE - Arnaud Desplechin

A PROPOS

Près de vingt ans après Comment je me suis disputé..., Arnaud Desplechin renoue avec le personnage central du film, Paul Dedalus, sur lequel il porte un nouvel éclairage. Ou plutôt, trois éclairages qui révèlent, selon l'angle de vue, des facettes contrastées, nouvelles ou familières. Tel un diamant, tantôt il accroche la lumière, tantôt il l'absorbe, tantôt il la renvoie en mille éclats éblouissants. Changeant et ambivalent, ainsi est le héros de Trois souvenirs de ma jeunesse. Ne cédant ni aux sirènes de la suite, ni même à celles du "prequel", le cinéaste livre à la fois le passé et l'avenir du jeune Dedalus tel qu'on le découvrait en 1996, comme s'il dézoomait soudain d'une période donnée pour offrir une vision d'ensemble de son existence.

Et que nous offre-t-il en vérité ? Trois chapitres, cinq si l'on compte le prologue et l'épilogue du film, durant lesquels se dévoilent la personnalité, les failles et les secrets du personnage. Une introspection moins minutieuse (les ellipses incessantes conservent à Dedalus sa part de mystère) que fluctuante, portée par le mécanisme étrange et capricieux de la mémoire. La première partie, surtout, est une succession de scènes si courtes qu'elles font l'effet de bribes de souvenirs à peine reliés entre eux. On y découvre un moment de l'enfance de Paul, tout en creux et en pointillés, qui s’il n’a pas vocation à "expliquer" sa personnalité, le présente clairement sous un jour particulier et un peu abrupt. Dans le deuxième fragment, c'est un épisode précis de l'adolescence du jeune homme qui prend vie à l'écran. Il brosse également à sa manière un nouveau portrait de Dedalus : gauche, un peu suiveur, sans grand panache. Dans la troisième partie, on se rapproche du personnage connu : beau parleur, brillant, à la répartie facile. Avec, en prémisse, ses atermoiements amoureux face à la troublante Esther et la genèse émouvante du couple qu'ils formeront dix ans plus tard dans Comment je me suis disputé.

Alors, au fond, qui est vraiment Dedalus ? Tandis que les blockbusters américains déclinent à l'envi les mêmes héros pour en vanter jusqu'à l'écœurement les mérites, Desplechin fait exactement le contraire, brossant à chaque plan ou presque un portrait différent du précédent, comme pour restituer dans ses moindres nuances la personnalité multiple de son personnage. Paul Dedalus ne se définit ainsi pas plus (mais pas moins non plus) par son abnégation adolescente face aux refuzniks russes que par sa fougue amoureuse envers Esther : il est la somme de tous ces aspects. Tour à tour l'un et l'autre, et tous en même temps.

Ce qui pousse Paul, et donc Arnaud Desplechin, à se pencher ainsi sur son passé, c'est moins la nostalgie que la tendresse. Une tendresse infinie à l'égard des périodes révolues : "Je regarde la fin de mon enfance" déclare le personnage avec tristesse au moment de la chute du mur de Berlin. Mais aussi une tendresse pour celui que l'on fut, avec ses défauts et ses failles. Dans la 3e partie du film, ce sont par exemple les détails sur la précarité financière de Paul qui le rendent attachant. De cette vie solitaire et pauvre, il tire comme une aura qui vient adoucir ses traits les moins flatteurs. Il y a aussi sa prétendue insensibilité face aux coups, leitmotiv qui se fait écho d’un chapitre à l’autre, telle une prise de distance rétrospective.

Le discours de Kovalki, rapporté par Esther, annonce lui l’inéluctabilité du temps qui passe et des liens qui se dénouent. L’amitié s’estompe en même temps que les souvenirs : un meilleur ami que l’on perd définitivement de vue, un autre avec lequel on se brouille, un amour qui prend l’eau… Plus que la fulgurance des dialogues, la justesse des choix de mise en scène, la fraîcheur des personnages, c’est ce regard-là qui constitue Trois souvenirs de ma jeunesse pour en faire une œuvre non seulement romanesque et savoureuse, mais aussi une réflexion sur l’écoulement du temps et le fil ténu de l’existence. Il y a une forme de bravade à conclure le film par une formule qui semble engloutir les vingt années passées en une seconde : "amour intact"/"chagrin intact" /"fureur intacte". Ce Paul Dedalus qui "se souvient" de sa jeunesse a beau être un autre, il est aussi toujours le même. Paradoxe de la mémoire et de la fluctuation des sentiments finement rendu à l’écran par le visage décomposé de cet homme adulte qui souffre à la place de l’adolescent qu’il fut.

Ecran Noir

Soirée rencontre
lundi 1 février 2016 à 20h15

En présence de Laetitia Jodeau-Belle, maitre de conférences à l'Université Rennes 2 et auteure du livre édité aux PUR: le non-rapport sexuel à l'adolescence, écrit en collaboration avec Christiane Page, professeur des Universités en études théâtrales.

Soirée organisée en collaboration avec ACF VLB


TROIS SOUVENIRS DE MA JEUNESSE

de Arnaud Desplechin

avec Quentin Dolmaire, Lou Roy Lecollinet, Mathieu Amalric
FRANCE - 2015 - 2h00

Paul Dédalus va quitter le Tadjikistan. Il se souvient… De son enfance à Roubaix… Des crises de folie de sa mère… Du lien qui l'unissait à son frère Ivan, enfant pieux et violent…Il se souvient… De ses seize ans… De son père, veuf inconsolable… De ce voyage en URSS où une mission clandestine l'avait conduit à offrir sa propre identité à un jeune homme russe… Il se souvient de ses dix-neuf ans, de sa soeur Delphine, de son cousin Bob, des soirées d'alors avec Pénélope, Mehdi et Kovalki, l'ami qui devait le trahir… De ses études à Paris, de sa rencontre avec le docteur Behanzin, de sa vocation naissante pour l'anthropologie… Et surtout, Paul se souvient d'Esther. Elle fut le coeur de sa vie. Doucement, « un coeur fanatique ».

http://www.le-pacte.com/france/prochainement/detail/trois-souvenirs-de-ma-jeunesse/

A PROPOS

Près de vingt ans après Comment je me suis disputé..., Arnaud Desplechin renoue avec le personnage central du film, Paul Dedalus, sur lequel il porte un nouvel éclairage. Ou plutôt, trois éclairages qui révèlent, selon l'angle de vue, des facettes contrastées, nouvelles ou familières. Tel un diamant, tantôt il accroche la lumière, tantôt il l'absorbe, tantôt il la renvoie en mille éclats éblouissants. Changeant et ambivalent, ainsi est le héros de Trois souvenirs de ma jeunesse. Ne cédant ni aux sirènes de la suite, ni même à celles du "prequel", le cinéaste livre à la fois le passé et l'avenir du jeune Dedalus tel qu'on le découvrait en 1996, comme s'il dézoomait soudain d'une période donnée pour offrir une vision d'ensemble de son existence.

Et que nous offre-t-il en vérité ? Trois chapitres, cinq si l'on compte le prologue et l'épilogue du film, durant lesquels se dévoilent la personnalité, les failles et les secrets du personnage. Une introspection moins minutieuse (les ellipses incessantes conservent à Dedalus sa part de mystère) que fluctuante, portée par le mécanisme étrange et capricieux de la mémoire. La première partie, surtout, est une succession de scènes si courtes qu'elles font l'effet de bribes de souvenirs à peine reliés entre eux. On y découvre un moment de l'enfance de Paul, tout en creux et en pointillés, qui s’il n’a pas vocation à "expliquer" sa personnalité, le présente clairement sous un jour particulier et un peu abrupt. Dans le deuxième fragment, c'est un épisode précis de l'adolescence du jeune homme qui prend vie à l'écran. Il brosse également à sa manière un nouveau portrait de Dedalus : gauche, un peu suiveur, sans grand panache. Dans la troisième partie, on se rapproche du personnage connu : beau parleur, brillant, à la répartie facile. Avec, en prémisse, ses atermoiements amoureux face à la troublante Esther et la genèse émouvante du couple qu'ils formeront dix ans plus tard dans Comment je me suis disputé.

Alors, au fond, qui est vraiment Dedalus ? Tandis que les blockbusters américains déclinent à l'envi les mêmes héros pour en vanter jusqu'à l'écœurement les mérites, Desplechin fait exactement le contraire, brossant à chaque plan ou presque un portrait différent du précédent, comme pour restituer dans ses moindres nuances la personnalité multiple de son personnage. Paul Dedalus ne se définit ainsi pas plus (mais pas moins non plus) par son abnégation adolescente face aux refuzniks russes que par sa fougue amoureuse envers Esther : il est la somme de tous ces aspects. Tour à tour l'un et l'autre, et tous en même temps.

Ce qui pousse Paul, et donc Arnaud Desplechin, à se pencher ainsi sur son passé, c'est moins la nostalgie que la tendresse. Une tendresse infinie à l'égard des périodes révolues : "Je regarde la fin de mon enfance" déclare le personnage avec tristesse au moment de la chute du mur de Berlin. Mais aussi une tendresse pour celui que l'on fut, avec ses défauts et ses failles. Dans la 3e partie du film, ce sont par exemple les détails sur la précarité financière de Paul qui le rendent attachant. De cette vie solitaire et pauvre, il tire comme une aura qui vient adoucir ses traits les moins flatteurs. Il y a aussi sa prétendue insensibilité face aux coups, leitmotiv qui se fait écho d’un chapitre à l’autre, telle une prise de distance rétrospective.

Le discours de Kovalki, rapporté par Esther, annonce lui l’inéluctabilité du temps qui passe et des liens qui se dénouent. L’amitié s’estompe en même temps que les souvenirs : un meilleur ami que l’on perd définitivement de vue, un autre avec lequel on se brouille, un amour qui prend l’eau… Plus que la fulgurance des dialogues, la justesse des choix de mise en scène, la fraîcheur des personnages, c’est ce regard-là qui constitue Trois souvenirs de ma jeunesse pour en faire une œuvre non seulement romanesque et savoureuse, mais aussi une réflexion sur l’écoulement du temps et le fil ténu de l’existence. Il y a une forme de bravade à conclure le film par une formule qui semble engloutir les vingt années passées en une seconde : "amour intact"/"chagrin intact" /"fureur intacte". Ce Paul Dedalus qui "se souvient" de sa jeunesse a beau être un autre, il est aussi toujours le même. Paradoxe de la mémoire et de la fluctuation des sentiments finement rendu à l’écran par le visage décomposé de cet homme adulte qui souffre à la place de l’adolescent qu’il fut.

Ecran Noir