ÉVÉNEMENTS ET SÉANCES SPECIALES

GUERRE ET PAIX - GUERRE ET PAIX - L' INTÉGRALE - 2024-05-12

GUERRE ET PAIX - L' INTÉGRALE - dimanche 12 mai à 10h45

GUERRE ET PAIX de Sergueï Bondartchouk

CASINO - Plans Cultes - 2024-05-14

Plans Cultes - mardi 14 mai à 20h00

CASINO de Martin Scorsese

LE DEUXIÈME ACTE - Avant-première - 2024-05-14

Avant-première - mardi 14 mai à 20h00

LE DEUXIÈME ACTE de Quentin Dupieux

LE DEUXIÈME ACTE - Ciné Cosy - 2024-05-17

Ciné Cosy - vendredi 17 mai à 13h15

LE DEUXIÈME ACTE de Quentin Dupieux

LES CHOSES HUMAINES - Soirée Rencontre - 2024-05-21

Soirée Rencontre - mardi 21 mai à 20h00

LES CHOSES HUMAINES de Yvan Attal

ANGERS, TEXAS : TEN YEARS AFTER - Festival Levitation - 2024-05-25

Festival Levitation - samedi 25 mai à 11h00

ANGERS, TEXAS : TEN YEARS AFTER de Antony Bou

NOS QUARTIERS ONT DE LA GUEULE ! - Ciné Doc - 2024-05-28

Ciné Doc - mardi 28 mai à 20h00

NOS QUARTIERS ONT DE LA GUEULE ! de Mohand Koroghli

LA MÈRE DE TOUS LES MENSONGES - Ciné Doc - 2024-05-28

Ciné Doc - mardi 28 mai à 20h00

LA MÈRE DE TOUS LES MENSONGES de Asmae El Moudir

POURQUOI TU SOURIS ? - Avant-Première / Rencontre - 2024-06-03

Avant-Première / Rencontre - lundi 03 juin à 20h00

POURQUOI TU SOURIS ? de Christine Paillard & Chad Chenouga

20 JOURS A MARIOUPOL - Ciné Doc - 2024-06-04

Ciné Doc - mardi 04 juin à 20h00

20 JOURS A MARIOUPOL de Mstyslav Tchernov

LA FEMME QUI EST PARTIE - Lav Diaz

A PROPOS

Le scénario de la Femme qui est partie pourrait être celui d’un film de Lino Brocka (la figure centrale du cinéma philippin des années 70-80, dont on a récemment pu redécouvrir les magnifiques Insiang et Manille), un entrelacs imprévisible de film noir, de mélodrame et de réalisme social. Nous y suivons Horacia (interprétée par la formidable Charo Santos, star eighties devenue magnate des médias et sortie d’une retraite d’un quart de siècle pour l’occasion) retournant dans le monde après avoir passé trente ans en prison pour un crime qu’elle n’a pas commis.

Après avoir constaté la mort de son mari et la disparition inexpliquée de son fils, elle part se venger de l’homme responsable de son malheur. Autour de la riche propriété de ce puissant, elle rencontre des exclus (un vendeur de rue bossu, une folle voyant des démons partout, des orphelins, un travesti suicidaire) dont elle deviendra une sorte d’ange gardien. Comme chez Brocka, tout ce qui relève ici du feuilleton populaire ou du cinéma de genre est un moyen de prendre le pouls d’une société violente et inégalitaire, d’en explorer les bas-fonds tout en prenant le parti de ceux qui se débattent. Loin de tout manichéisme, chaque personnage possède sa part de secret, de duplicité (à l’image d’Horacia qui, du jour à la nuit, change d’aspect et quasiment de personnalité), ce qui confère au film une extraordinaire densité romanesque. Mais là où Brocka réalisait des films nerveux et brutaux, Diaz prend son temps. Un temps, disons-le tout de suite, qui ne se leste d’aucun ennui malgré la durée du film (3 h 46). Un temps consistant à restituer très concrètement les lieux, leurs différents reliefs et rythmes, et à y offrir une place aux personnages. Les plans sont d’une somptuosité étrange qui n’a rien d’esthétisant : le cinéaste ne cherche pas à embellir mais il tient à trouver la beauté là où elle se niche, souvent dans une lumière ou une perspective troublante offerte par la profondeur de champ.

Si tous ses plans donnent le sentiment d’avoir un cadre et une durée parfaitement justes, c’est aussi par leur façon d’accueillir les personnages, de leur ouvrir un espace, de leur ménager comme un refuge. C’est comme si la réalisation répondait à la noirceur du scénario par une forme d’apaisement dans des cadres où les êtres existent bien au-delà de l’accablement que leur fait subir leur condition. Diaz maintient la violence hors champ, préférant ce qui se passe avant ou après, les pauses, les attentes, les convalescences, comme s’il se tenait aux interstices de toutes ces tragédies. La violence est à la fois partout et nulle part, comme en suspension dans l’air, et éclatant souvent de façon décalée : tous peuvent être assassins ou victimes, les rôles s’échangent.

Dans ces plans toujours larges, les personnages ont tous une tenue et une façon de se mouvoir traduisant sensiblement leurs états et donnant une intensité théâtrale à ce microcosme réaliste (en cela, on pense parfois à Akira Kurosawa). Les plus accablés (le bossu, la folle, le travesti) semblent constamment empêchés de se tenir droit, leurs corps se caractérisant par un déséquilibre qui les fait osciller entre la chute, l’ivresse et la danse. Horacia se maintient au contraire toujours les deux pieds bien ancrés au sol, dans la rigidité de celle qui attend son heure pour se déployer. Et c’est d’abord dans cette façon de se tenir que résident à la fois sa dignité et son incapacité à revivre enfin. En ce sens, la chorégraphie du dernier plan (dont nous ne dirons rien) est particulièrement bouleversante.

Marcos Uzal (Libération)

Séance exceptionnelle
dimanche 5 mars 2017 à 11h00

Tarif unique  : 4.80


LA FEMME QUI EST PARTIE

de Lav Diaz

avec Charo Santos-Concio, John Lloyd Cruz, Michael De Mesa
PHILIPPINES - 3h46 - 2016 - VOST - Lion d'Or Venise 2016

Horacia sort de prison, trente ans après avoir été injustement incarcérée. Elle a deux raisons de vivre: se venger de l'homme qui l'a fait condamner et retrouver son fils. 
http://www.arpselection.com/category/tous-nos-films/drame/la-femme-qui-est-partie-385.html#images

A PROPOS

Le scénario de la Femme qui est partie pourrait être celui d’un film de Lino Brocka (la figure centrale du cinéma philippin des années 70-80, dont on a récemment pu redécouvrir les magnifiques Insiang et Manille), un entrelacs imprévisible de film noir, de mélodrame et de réalisme social. Nous y suivons Horacia (interprétée par la formidable Charo Santos, star eighties devenue magnate des médias et sortie d’une retraite d’un quart de siècle pour l’occasion) retournant dans le monde après avoir passé trente ans en prison pour un crime qu’elle n’a pas commis.

Après avoir constaté la mort de son mari et la disparition inexpliquée de son fils, elle part se venger de l’homme responsable de son malheur. Autour de la riche propriété de ce puissant, elle rencontre des exclus (un vendeur de rue bossu, une folle voyant des démons partout, des orphelins, un travesti suicidaire) dont elle deviendra une sorte d’ange gardien. Comme chez Brocka, tout ce qui relève ici du feuilleton populaire ou du cinéma de genre est un moyen de prendre le pouls d’une société violente et inégalitaire, d’en explorer les bas-fonds tout en prenant le parti de ceux qui se débattent. Loin de tout manichéisme, chaque personnage possède sa part de secret, de duplicité (à l’image d’Horacia qui, du jour à la nuit, change d’aspect et quasiment de personnalité), ce qui confère au film une extraordinaire densité romanesque. Mais là où Brocka réalisait des films nerveux et brutaux, Diaz prend son temps. Un temps, disons-le tout de suite, qui ne se leste d’aucun ennui malgré la durée du film (3 h 46). Un temps consistant à restituer très concrètement les lieux, leurs différents reliefs et rythmes, et à y offrir une place aux personnages. Les plans sont d’une somptuosité étrange qui n’a rien d’esthétisant : le cinéaste ne cherche pas à embellir mais il tient à trouver la beauté là où elle se niche, souvent dans une lumière ou une perspective troublante offerte par la profondeur de champ.

Si tous ses plans donnent le sentiment d’avoir un cadre et une durée parfaitement justes, c’est aussi par leur façon d’accueillir les personnages, de leur ouvrir un espace, de leur ménager comme un refuge. C’est comme si la réalisation répondait à la noirceur du scénario par une forme d’apaisement dans des cadres où les êtres existent bien au-delà de l’accablement que leur fait subir leur condition. Diaz maintient la violence hors champ, préférant ce qui se passe avant ou après, les pauses, les attentes, les convalescences, comme s’il se tenait aux interstices de toutes ces tragédies. La violence est à la fois partout et nulle part, comme en suspension dans l’air, et éclatant souvent de façon décalée : tous peuvent être assassins ou victimes, les rôles s’échangent.

Dans ces plans toujours larges, les personnages ont tous une tenue et une façon de se mouvoir traduisant sensiblement leurs états et donnant une intensité théâtrale à ce microcosme réaliste (en cela, on pense parfois à Akira Kurosawa). Les plus accablés (le bossu, la folle, le travesti) semblent constamment empêchés de se tenir droit, leurs corps se caractérisant par un déséquilibre qui les fait osciller entre la chute, l’ivresse et la danse. Horacia se maintient au contraire toujours les deux pieds bien ancrés au sol, dans la rigidité de celle qui attend son heure pour se déployer. Et c’est d’abord dans cette façon de se tenir que résident à la fois sa dignité et son incapacité à revivre enfin. En ce sens, la chorégraphie du dernier plan (dont nous ne dirons rien) est particulièrement bouleversante.

Marcos Uzal (Libération)