ÉVÉNEMENTS ET SÉANCES SPECIALES

SANS VOIX - Avant première - 2024-03-30

Avant première - samedi 30 mars à 10h45

SANS VOIX de Laëtitia Caillet

LES LUEURS D'ADEN - Soirée Rencontre - 2024-04-02

Soirée Rencontre - mardi 02 avril à 20h00

LES LUEURS D'ADEN de Amr Gamal

LE MUR QUI NOUS SÉPARE - Ciné Fac - 2024-04-04

Ciné Fac - jeudi 04 avril à 20h00

LE MUR QUI NOUS SÉPARE de Norbert Lechner

L'INCOMPRIS - Soirée Rencontre - 2024-04-04

Soirée Rencontre - jeudi 04 avril à 20h00

L'INCOMPRIS de Luigi Comencini

ALICE DANS LES VILLES - Ciné classique - 2024-04-07

Ciné classique - dimanche 07 avril à 17h45

ALICE DANS LES VILLES de Wim Wenders

TOUTES LES COULEURS DU MONDE - Avant-première - 2024-04-08

Avant-première - lundi 08 avril à 20h00

TOUTES LES COULEURS DU MONDE de Babatunde Apalowo

AVERROÈS ET ROSA PARKS - Avant-Première / Soirée Nicolas Philibert - 2024-04-09

Avant-Première / Soirée Nicolas Philibert - mardi 09 avril à 17h30

AVERROÈS ET ROSA PARKS de Nicolas Philibert

LA MACHINE À ÉCRIRE ET AUTRES SOURCES DE TRACAS de Nicolas Philibert

PROMISED LAND - Soirée CinéConf - 2024-04-11

Soirée CinéConf - jeudi 11 avril à 20h00

PROMISED LAND de Gus Van Sant

LE PETIT BLOND DE LA CASBAH - Ciné Rencontre - 2024-04-14

Ciné Rencontre - dimanche 14 avril à 13h15

LE PETIT BLOND DE LA CASBAH de Alexandre Arcady

BLUE GIANT - Ciné Manga - 2024-04-15

Ciné Manga - lundi 15 avril à 20h00

BLUE GIANT de Yuzuru Tachikawa

GHOST DOG : LA VOIE DU SAMOURAÏ - Plans Cultes - 2024-04-16

Plans Cultes - mardi 16 avril à 20h00

GHOST DOG : LA VOIE DU SAMOURAÏ de Jim Jarmusch

AMAL - UN ESPRIT LIBRE - Ciné Rencontre - 2024-04-17

Ciné Rencontre - mercredi 17 avril à 20h00

AMAL - UN ESPRIT LIBRE de Jawad Rhalib

ROSALIE - Ciné Cosy - 2024-04-19

Ciné Cosy - vendredi 19 avril à 13h15

ROSALIE de Stéphanie Di Giusto

UN HOMME D'EXCEPTION - Ciné Rencontre - 2024-04-22

Ciné Rencontre - lundi 22 avril à 20h00

UN HOMME D'EXCEPTION de Ron Howard

CASINO - Plans Cultes - 2024-05-14

Plans Cultes - mardi 14 mai à 20h00

CASINO de Martin Scorsese

POLINA, DANSER SA VIE - Valérie Müller, Angelin Preljocaj

A PROPOS

Au bout du compte, Angelin Preljocaj et Valérie Müller n’auront pas gardé grand-chose de Polina. Le roman graphique de Bastien Vivès, succès de librairie de l’année 2011, que le producteur Didier Creste leur a un jour proposé d’adapter, aura été une base, pas un modèle. Ils en ont conservé le titre, en l’étoffant de ce commentaire programmatique, « danser sa vie ». Ils en ont repris la trame : les années de formation d’une jeune ballerine qui décide, alors qu’elle est sur le point de devenir danseuse étoile, de prendre la tangente pour rejoindre le monde libre de la danse contemporaine. Et quelques éléments ici et là, en particulier le caractère de ce personnage, buté et rebelle, qui les avait séduits.
 
Le reste leur appartient. Construit comme une succession de tableaux qui voient filer la jeune Polina vers son destin, le film invente un langage propre qui passe par les corps, par la danse, par les regards. Renouant avec la grande tradition de la comédie musicale hollywoodienne classique, avec des scènes dansées qui prennent littéralement en charge le récit, il brouille volontairement les frontières entre la danse et la vie. La trame narrative, simple, linéaire, est celle d’un conte de fées moderne – et féministe en un sens, puisque, en s’émancipant du milieu corseté de la danse classique, la jeune femme décide de devenir chorégraphe.
 
En même temps, elle s’inscrit dans un contexte très réaliste. Depuis sa Russie natale, où sa famille se saigne pour financer ses cours de danse, jusqu’aux rues mouillées d’Anvers où Polina trouve sa voie après une escale au doux soleil d’Aix-en-Provence, son parcours évoque celui de nombreux danseurs d’aujourd’hui. « Ils sont nombreux à venir de milieux très pauvres, note Valérie Müller. Et cela se comprend. Comme Angelin le dit souvent, quand on n’a rien, on a toujours un corps avec lequel on peut travailler, exprimer sa vocation artistique. Quant à cette traversée de l’Europe, elle reflète le parcours professionnel de la plupart de ces jeunes gens. »
 
Unis à la ville, le chorégraphe et la réalisatrice (on lui doit un long-métrage de fiction, Le Monde de Fred, sorti en 2014, et des documentaires pour la télévision, notamment un sur Angelin Preljocaj) ont embrassé ce projet avec le désir de réaliser ensemble un « film qui danse ». Hybrider la danse et le cinéma, confronter leurs sensibilités, fusionner leurs expériences, chercher une alchimie. Au risque de l’impureté, mais avec cette conviction qui est à la fois propre à la danse et au cinéma, que le mouvement exprime la vie dans son essence, dans sa vérité.
 
Dans Polina, on danse partout, tout le temps. On danse pendant les cours, on danse sur scène, en boîte de nuit. On danse à la maison, dans la chaleur du foyer, au son de vieux chants russes traditionnels. On danse dans la forêt enneigée, la nuit, après une journée d’entraînement où on s’est senti pousser des ailes, entre les barres d’immeubles anthracite dont les fenêtres s’habillent d’un coup de touches de couleur vive. « Il y a cette idée que tout nourrit le parcours du personnage, y compris l’architecture dans laquelle elle grandit, y compris la nature, soutient Valérie Müller. C’est pour cela, pour pouvoir inscrire les mouvements de la danse dans les décors, que nous avons choisi de travailler en scope. Pour les scènes de répétition, on filmait différemment : plus serré, à l’épaule. Pour le duo final encore autrement, avec une grue. »
 
Les dialogues viennent affiner, étoffer les situations, comme le font les accessoires, ou l’ambiance musicale. Mais la construction du personnage, sa personnalité, son désir, ses conflits, son évolution, passent par la danse – les mouvements des acteurs, chorégraphiés par Preljocaj, exaltés par un magnifique travail de cadre, de couleur, de lumière, et par un montage expressif.
 
« Je pense profondément que le corps porte l’être », soutient Angelin Preljocaj, justifiant ainsi le fait d’avoir choisi des acteurs sachant danser. Juliette Binoche notamment, qui danse quotidiennement dans le cadre de sa discipline d’actrice – elle a notamment participé à un ballet pour Akram Khan –, pour le rôle de la chorégraphe qui, à Aix-en-Provence, initie Polina à la danse contemporaine. Ou Niels Schneider, qui n’avait jamais dansé, mais que le chorégraphe a formé en l’intégrant, en 2015, à un spectacle qui réunissait des amateurs et des professionnels.
 
Traquer la vérité des acteurs dans leurs mouvements, pour en nourrir les personnages. C’est avec cette croyance, la conviction qu’ils pourraient ainsi toucher à la grâce, qu’ont travaillé Preljocaj et Müller. Aux antipodes de Black Swan, de Darren Aronofsky, par exemple, où Natalie Portman fut souvent doublée, ils rêvaient aux pas aériens de Fred Astaire et Ginger Rogers. Pour jouer Polina, il leur fallait donc une danseuse capable de dompter la caméra et de jouer la comédie. Ce qui ne court pas les rues ni les castings.
 
Ils l’ont cherchée longtemps, d’abord en France, sans succès, puis en Russie, où ils ont auditionné pas moins de six cents danseuses. Mais leur persévérance a porté ses fruits au-delà de leurs espérances. Elève de la prestigieuse académie de ballet Vaganova de Saint-Pétersbourg – elle a depuis intégré la troupe du Mariinski –, Anastasia Shevtsova les a sidérés. Entre la préparation et le tournage, cette jeune femme dont l’aura magnétise littéralement le film a comme fusionné avec son personnage. Apprenant le français aussi vite que Polina, elle pense aujourd’hui, comme elle, faire de la danse contemporaine et devenir chorégraphe. Et pourquoi pas, aussi, à continuer le cinéma.
 
Isabelle Regnier (Le Monde).

Ciné Danse
mardi 25 février 2020 à 20h15

présenté par Claire Rousier, directrice adjointe du CNDC

Séance organisée en collaboration avec le CNDC


POLINA, DANSER SA VIE

de Valérie Müller, Angelin Preljocaj

avec Anastasia Shevtsova, Juliette Binoche, Aleksei Guskov
FRANCE - 2015 - 1h52

Russie, dans les années 90. Portée depuis l'enfance par la rigueur et l'exigence du professeur Bojinski, Polina est une danseuse classique prometteuse. Alors qu'elle s'apprête à intégrer le prestigieux ballet du Bolchoï, elle assiste à un spectacle de danse contemporaine qui la bouleverse profondément. C'est un choc artistique qui fait vaciller tout ce en quoi elle croyait. Elle décide de tout quitter et rejoint Aix-en-Provence pour travailler avec la talentueuse chorégraphe Liria Elsaj et tenter de trouver sa propre voie.
http://www.ugcdistribution.fr/film/polina-danser-sa-vie/

A PROPOS

Au bout du compte, Angelin Preljocaj et Valérie Müller n’auront pas gardé grand-chose de Polina. Le roman graphique de Bastien Vivès, succès de librairie de l’année 2011, que le producteur Didier Creste leur a un jour proposé d’adapter, aura été une base, pas un modèle. Ils en ont conservé le titre, en l’étoffant de ce commentaire programmatique, « danser sa vie ». Ils en ont repris la trame : les années de formation d’une jeune ballerine qui décide, alors qu’elle est sur le point de devenir danseuse étoile, de prendre la tangente pour rejoindre le monde libre de la danse contemporaine. Et quelques éléments ici et là, en particulier le caractère de ce personnage, buté et rebelle, qui les avait séduits.
 
Le reste leur appartient. Construit comme une succession de tableaux qui voient filer la jeune Polina vers son destin, le film invente un langage propre qui passe par les corps, par la danse, par les regards. Renouant avec la grande tradition de la comédie musicale hollywoodienne classique, avec des scènes dansées qui prennent littéralement en charge le récit, il brouille volontairement les frontières entre la danse et la vie. La trame narrative, simple, linéaire, est celle d’un conte de fées moderne – et féministe en un sens, puisque, en s’émancipant du milieu corseté de la danse classique, la jeune femme décide de devenir chorégraphe.
 
En même temps, elle s’inscrit dans un contexte très réaliste. Depuis sa Russie natale, où sa famille se saigne pour financer ses cours de danse, jusqu’aux rues mouillées d’Anvers où Polina trouve sa voie après une escale au doux soleil d’Aix-en-Provence, son parcours évoque celui de nombreux danseurs d’aujourd’hui. « Ils sont nombreux à venir de milieux très pauvres, note Valérie Müller. Et cela se comprend. Comme Angelin le dit souvent, quand on n’a rien, on a toujours un corps avec lequel on peut travailler, exprimer sa vocation artistique. Quant à cette traversée de l’Europe, elle reflète le parcours professionnel de la plupart de ces jeunes gens. »
 
Unis à la ville, le chorégraphe et la réalisatrice (on lui doit un long-métrage de fiction, Le Monde de Fred, sorti en 2014, et des documentaires pour la télévision, notamment un sur Angelin Preljocaj) ont embrassé ce projet avec le désir de réaliser ensemble un « film qui danse ». Hybrider la danse et le cinéma, confronter leurs sensibilités, fusionner leurs expériences, chercher une alchimie. Au risque de l’impureté, mais avec cette conviction qui est à la fois propre à la danse et au cinéma, que le mouvement exprime la vie dans son essence, dans sa vérité.
 
Dans Polina, on danse partout, tout le temps. On danse pendant les cours, on danse sur scène, en boîte de nuit. On danse à la maison, dans la chaleur du foyer, au son de vieux chants russes traditionnels. On danse dans la forêt enneigée, la nuit, après une journée d’entraînement où on s’est senti pousser des ailes, entre les barres d’immeubles anthracite dont les fenêtres s’habillent d’un coup de touches de couleur vive. « Il y a cette idée que tout nourrit le parcours du personnage, y compris l’architecture dans laquelle elle grandit, y compris la nature, soutient Valérie Müller. C’est pour cela, pour pouvoir inscrire les mouvements de la danse dans les décors, que nous avons choisi de travailler en scope. Pour les scènes de répétition, on filmait différemment : plus serré, à l’épaule. Pour le duo final encore autrement, avec une grue. »
 
Les dialogues viennent affiner, étoffer les situations, comme le font les accessoires, ou l’ambiance musicale. Mais la construction du personnage, sa personnalité, son désir, ses conflits, son évolution, passent par la danse – les mouvements des acteurs, chorégraphiés par Preljocaj, exaltés par un magnifique travail de cadre, de couleur, de lumière, et par un montage expressif.
 
« Je pense profondément que le corps porte l’être », soutient Angelin Preljocaj, justifiant ainsi le fait d’avoir choisi des acteurs sachant danser. Juliette Binoche notamment, qui danse quotidiennement dans le cadre de sa discipline d’actrice – elle a notamment participé à un ballet pour Akram Khan –, pour le rôle de la chorégraphe qui, à Aix-en-Provence, initie Polina à la danse contemporaine. Ou Niels Schneider, qui n’avait jamais dansé, mais que le chorégraphe a formé en l’intégrant, en 2015, à un spectacle qui réunissait des amateurs et des professionnels.
 
Traquer la vérité des acteurs dans leurs mouvements, pour en nourrir les personnages. C’est avec cette croyance, la conviction qu’ils pourraient ainsi toucher à la grâce, qu’ont travaillé Preljocaj et Müller. Aux antipodes de Black Swan, de Darren Aronofsky, par exemple, où Natalie Portman fut souvent doublée, ils rêvaient aux pas aériens de Fred Astaire et Ginger Rogers. Pour jouer Polina, il leur fallait donc une danseuse capable de dompter la caméra et de jouer la comédie. Ce qui ne court pas les rues ni les castings.
 
Ils l’ont cherchée longtemps, d’abord en France, sans succès, puis en Russie, où ils ont auditionné pas moins de six cents danseuses. Mais leur persévérance a porté ses fruits au-delà de leurs espérances. Elève de la prestigieuse académie de ballet Vaganova de Saint-Pétersbourg – elle a depuis intégré la troupe du Mariinski –, Anastasia Shevtsova les a sidérés. Entre la préparation et le tournage, cette jeune femme dont l’aura magnétise littéralement le film a comme fusionné avec son personnage. Apprenant le français aussi vite que Polina, elle pense aujourd’hui, comme elle, faire de la danse contemporaine et devenir chorégraphe. Et pourquoi pas, aussi, à continuer le cinéma.
 
Isabelle Regnier (Le Monde).