ÉVÉNEMENTS ET SÉANCES SPECIALES
A PROPOS
Coécrit avec Bernardino Zapponi et Marco Risi, fils du réalisateur, Cher papa a vu le jour dans le contexte d’apogée des Années de plomb. L’assassinat d’Aldo Moro par les Brigades rouges, traumatisme pour la société italienne, semble implicitement évoqué dans ce récit d’un industriel découvrant que son fils a des liens avec une organisation d’extrême gauche. Pourtant, Dino Risi n’est pas un cinéaste explicitement politique, comme a pu l’être un Francesco Rosi (Cadavres exquis). Ses films, avec sans cadre historique, ont pourtant souvent traité des conflits avec l’autorité, du pouvoir arbitraire et des engagements ambigus, de La marche sur Rome au Fou de guerre en passant par Au nom du peuple italien. Et comme Monicelli ou Scola, le cinéaste aborde souvent des problèmes graves en utilisant le genre de la comédie comme cheval de Troie. Car on rit souvent dans la première partie de Cher papa, de par la personnalité d’Albino Millozza, industriel quinquagénaire et pressé, aussi exubérant, volubile et dragueur que Le fanfaron, maniant l’humour noir comme l’aveugle de Parfum de femme, personnages auxquels Vittorio Gassman prêtait déjà sa puissance histrionique.
Vivant dans une villa cossue, Albino est la fois paternaliste et méprisant avec son couple de domestiques africains. Ses affaires sont plutôt florissantes, quitte à s’accommoder d’un zeste de corruption, avec la complicité de son associé (Julien Guiomar). Et sur le plan affectif, il a trouvé un arrangement avec son épouse (Andrée Lachapelle) et sa maîtresse (Aurore Clément). La première vit en Suisse avec une solide pension, quand la seconde bénéficie de sa générosité matérielle à Rome. Mais son entreprise subit les critiques des ennemis de la société capitaliste, et ses problèmes personnels sont manifestes quand il réalise que communication avec ses trois enfants est difficile. Le plus petit vit avec sa mère qui ne veut plus qu’il parle italien, et sa fille, internée, lui crache littéralement au visage. Quant à Marco qu’il n’a pas vu grandir, il éprouve un certain mépris pour ce père qui ne correspond pas à son idéal.
Cher papa passe avec bonheur de la légèreté à la mélancolie, du comique de situation (un travesti anglais qui débarque inopinément au moment où il compte coucher avec une jeune femme) à la tension dramatique, du divertissement à la tragédie. « Superficiellement superficiel », comme aurait dit Max Ophüls, Marco va prendre conscience du vide de son existence mais aussi des utopies de la génération montante, tandis que le fils passe de la politesse introvertie à la rébellion, de la compromission à la trahison, puis à la pureté. Car Cher papa est aussi et surtout un beau portait de relation filiale, culminant dans un final bouleversant. Présenté en compétition officielle au Festival de Cannes 1979, le film fut récompensé par le biais du jeune Stefano Madia, qui reçut le prix du meilleur second rôle. Il connut un succès important en Italie, mais moindre en France. Il est désormais temps de le redécouvrir. Cela est possible grâce au distributeur Les Acacias qui le ressort en version restaurée, en même temps que le méconnu Fantôme d’amour.
Gérard Crespo (Avoiralire.com)
Ciné Classique
dimanche 24 mars
2024 à 17h45
présenté par Jean-Pierre Bleys, spécialisé en histoire du cinéma
Tarif Printemps du cinéma : 5€
Séance organisée en collaboration avec Cinéma Parlant dans le cadre de la semaine de cinéma de langue italienne
CHER PAPA
de Dino Risi
avec Vittorio Gassman, Andrée Lachapelle, Aurore Clément
ITALIE - 1979 - 1h59 - VOST
Un industriel, qui a une aventure avec la femme d'un de ses collègues, apprend que son fils, impliqué de plus ou moins près dans les Brigades Rouges, doit exécuter une personne désignée par la seule lettre "P". Il pense aussitôt à son collègue.
https://www.acaciasfilms.com/film/5428/
A PROPOS
Coécrit avec Bernardino Zapponi et Marco Risi, fils du réalisateur, Cher papa a vu le jour dans le contexte d’apogée des Années de plomb. L’assassinat d’Aldo Moro par les Brigades rouges, traumatisme pour la société italienne, semble implicitement évoqué dans ce récit d’un industriel découvrant que son fils a des liens avec une organisation d’extrême gauche. Pourtant, Dino Risi n’est pas un cinéaste explicitement politique, comme a pu l’être un Francesco Rosi (Cadavres exquis). Ses films, avec sans cadre historique, ont pourtant souvent traité des conflits avec l’autorité, du pouvoir arbitraire et des engagements ambigus, de La marche sur Rome au Fou de guerre en passant par Au nom du peuple italien. Et comme Monicelli ou Scola, le cinéaste aborde souvent des problèmes graves en utilisant le genre de la comédie comme cheval de Troie. Car on rit souvent dans la première partie de Cher papa, de par la personnalité d’Albino Millozza, industriel quinquagénaire et pressé, aussi exubérant, volubile et dragueur que Le fanfaron, maniant l’humour noir comme l’aveugle de Parfum de femme, personnages auxquels Vittorio Gassman prêtait déjà sa puissance histrionique.
Vivant dans une villa cossue, Albino est la fois paternaliste et méprisant avec son couple de domestiques africains. Ses affaires sont plutôt florissantes, quitte à s’accommoder d’un zeste de corruption, avec la complicité de son associé (Julien Guiomar). Et sur le plan affectif, il a trouvé un arrangement avec son épouse (Andrée Lachapelle) et sa maîtresse (Aurore Clément). La première vit en Suisse avec une solide pension, quand la seconde bénéficie de sa générosité matérielle à Rome. Mais son entreprise subit les critiques des ennemis de la société capitaliste, et ses problèmes personnels sont manifestes quand il réalise que communication avec ses trois enfants est difficile. Le plus petit vit avec sa mère qui ne veut plus qu’il parle italien, et sa fille, internée, lui crache littéralement au visage. Quant à Marco qu’il n’a pas vu grandir, il éprouve un certain mépris pour ce père qui ne correspond pas à son idéal.
Cher papa passe avec bonheur de la légèreté à la mélancolie, du comique de situation (un travesti anglais qui débarque inopinément au moment où il compte coucher avec une jeune femme) à la tension dramatique, du divertissement à la tragédie. « Superficiellement superficiel », comme aurait dit Max Ophüls, Marco va prendre conscience du vide de son existence mais aussi des utopies de la génération montante, tandis que le fils passe de la politesse introvertie à la rébellion, de la compromission à la trahison, puis à la pureté. Car Cher papa est aussi et surtout un beau portait de relation filiale, culminant dans un final bouleversant. Présenté en compétition officielle au Festival de Cannes 1979, le film fut récompensé par le biais du jeune Stefano Madia, qui reçut le prix du meilleur second rôle. Il connut un succès important en Italie, mais moindre en France. Il est désormais temps de le redécouvrir. Cela est possible grâce au distributeur Les Acacias qui le ressort en version restaurée, en même temps que le méconnu Fantôme d’amour.
Gérard Crespo (Avoiralire.com)