ÉVÉNEMENTS ET SÉANCES SPECIALES

PATTI CAKE$ - Geremy Jasper

A PROPOS

Dès la séquence d’ouverture, détonante et psychédélique, on a conscience d’être face à un film singulier et audacieux qui n’a pas peur d’assumer ses choix esthétiques. Tout de suite, Patti cakes en jette : couleurs vives, musique à fond, délire de gloire égocentrique... C'est ainsi que l'on fait connaissance avec Patti, l'héroïne du film. On est dans son rêve, et l'on chute avec elle lorsque le réveil sonne. Même visuellement, c'est une redescente : les images sont moins léchées, le style plus documentaire. Car la réalité est franchement moins reluisante : petit job alimentaire, grand-mère malade, mère démissionnaire, et horizon bouché. Le tout dans une petite ville de l'état du New Jersey dont le film dresse en quelques plans un tableau assassin, à grand renfort d'usines polluantes et de décharge publique. Presque de l'autre côté du pont, quasiment à portée de mains, se trouve New York, symbole imposant d'une inaccessible vie meilleure.

Mais Patti est plus du genre Hit-Girl que Cosette, si l'on ose la comparaison. Alors elle ne s'apitoie pas, elle agit. Pour la suivre, le film est sans cesse en mouvement. Scènes courtes, plans cut. L'intrigue avance à 100 à l'heure, entre le mentor-meilleur ami, la mère irresponsable, les problèmes d'argent, les rivalités. C'est drôle, enlevé, parfois un peu barré. On aura rarement vu une héroïne aussi originale et fédératrice, d'autant qu'elle se coltine avec énormément de talent (le personnage, mais aussi l'actrice, la merveilleuse Danielle MacDonald) le milieu macho et conformiste du rap. En tant que femme, blanche, en surpoids de surcroît, elle dynamite tous les clichés, loin des bimbos décérébrées, loin des rappeuses en baggy. Elle-même tout simplement.

Le film raconte justement comment Patti n'est a priori à sa place nulle part, et parvient pourtant à s'intégrer partout parce qu'elle est désarmante de naturel, d'humour et d'intelligence. On est quelque part entre le film d'apprentissage (tous les personnages "grandissent" au cours du film, même les plus adultes) et le conte de fées en forme d'ode à la différence et à l'amitié. Et on a envie de croire à ce groupe de doux marginaux, de vibrer avec eux, et bien sûr de danser sur leurs créations. Car la musique apporte beaucoup de charme à l'ensemble, entre paroles décalées et rythmes accrocheurs.

Si la construction du scénario reste extrêmement classique, avec sa progression en dents de scie et son cheminement un peu trop prévisible, parfois même inutilement mélodramatique, Geremy Jasper se rattrape sur la forme, avec un montage très cut, des séquences ultra-oniriques, une multiplicité de styles et une énergie communicative qui gomme les longueurs et les maladresses. Il propose un Feel good movie attachant, déterminé, et plus profond qu'il n'y paraît dans son portrait d'une jeunesse pleine d'envies et d'aspirations, mais corsetée par les difficultés sociales et économiques. Le film, c'est vrai, n'échappe pas à la comparaison avec 8 mile de Curtis Hanson, sur l'émergence d'un rappeur blanc interprété par Eminem. Mais au-delà de la trame, l'approche est si rigoureusement différente que l'on oublie vite cette encombrante référence. Tout le mal qu'on peut souhaiter à Patti cakes, c'est juste d’en suivre le chemin et de devenir à son tour un classique du genre.

MpM (Ecran noir)

Avant première
mardi 22 août 2017 à 19h45


PATTI CAKE$

de Geremy Jasper

avec Danielle Macdonald, Bridget Everett, Mamoudou Athie
USA - 2017 - 1h48 - Cannes 2017 - VOST

Patricia Dombrowski, alias Patti Cake$, a 23 ans. Elle rêve de devenir la star du hip-hop, rencontrer O-Z, son Dieu du rap et surtout fuir sa petite ville du New Jersey et son job de serveuse dans un bar miteux.
Elle doit cependant s'occuper de Nana, sa grand-mère qu'elle adore, et de Barb, sa mère, une chanteuse ratée et totalement instable.
Un soir, au cours d'une battle sur un parking, elle révèle tout son talent de slammeuse.
Elle s'embarque alors dans une aventure musicale avec Jheri, son meilleur ami et Basterd, un musicien mutique et asocial. 
http://diaphana.fr/film/patti-cake/

A PROPOS

Dès la séquence d’ouverture, détonante et psychédélique, on a conscience d’être face à un film singulier et audacieux qui n’a pas peur d’assumer ses choix esthétiques. Tout de suite, Patti cakes en jette : couleurs vives, musique à fond, délire de gloire égocentrique... C'est ainsi que l'on fait connaissance avec Patti, l'héroïne du film. On est dans son rêve, et l'on chute avec elle lorsque le réveil sonne. Même visuellement, c'est une redescente : les images sont moins léchées, le style plus documentaire. Car la réalité est franchement moins reluisante : petit job alimentaire, grand-mère malade, mère démissionnaire, et horizon bouché. Le tout dans une petite ville de l'état du New Jersey dont le film dresse en quelques plans un tableau assassin, à grand renfort d'usines polluantes et de décharge publique. Presque de l'autre côté du pont, quasiment à portée de mains, se trouve New York, symbole imposant d'une inaccessible vie meilleure.

Mais Patti est plus du genre Hit-Girl que Cosette, si l'on ose la comparaison. Alors elle ne s'apitoie pas, elle agit. Pour la suivre, le film est sans cesse en mouvement. Scènes courtes, plans cut. L'intrigue avance à 100 à l'heure, entre le mentor-meilleur ami, la mère irresponsable, les problèmes d'argent, les rivalités. C'est drôle, enlevé, parfois un peu barré. On aura rarement vu une héroïne aussi originale et fédératrice, d'autant qu'elle se coltine avec énormément de talent (le personnage, mais aussi l'actrice, la merveilleuse Danielle MacDonald) le milieu macho et conformiste du rap. En tant que femme, blanche, en surpoids de surcroît, elle dynamite tous les clichés, loin des bimbos décérébrées, loin des rappeuses en baggy. Elle-même tout simplement.

Le film raconte justement comment Patti n'est a priori à sa place nulle part, et parvient pourtant à s'intégrer partout parce qu'elle est désarmante de naturel, d'humour et d'intelligence. On est quelque part entre le film d'apprentissage (tous les personnages "grandissent" au cours du film, même les plus adultes) et le conte de fées en forme d'ode à la différence et à l'amitié. Et on a envie de croire à ce groupe de doux marginaux, de vibrer avec eux, et bien sûr de danser sur leurs créations. Car la musique apporte beaucoup de charme à l'ensemble, entre paroles décalées et rythmes accrocheurs.

Si la construction du scénario reste extrêmement classique, avec sa progression en dents de scie et son cheminement un peu trop prévisible, parfois même inutilement mélodramatique, Geremy Jasper se rattrape sur la forme, avec un montage très cut, des séquences ultra-oniriques, une multiplicité de styles et une énergie communicative qui gomme les longueurs et les maladresses. Il propose un Feel good movie attachant, déterminé, et plus profond qu'il n'y paraît dans son portrait d'une jeunesse pleine d'envies et d'aspirations, mais corsetée par les difficultés sociales et économiques. Le film, c'est vrai, n'échappe pas à la comparaison avec 8 mile de Curtis Hanson, sur l'émergence d'un rappeur blanc interprété par Eminem. Mais au-delà de la trame, l'approche est si rigoureusement différente que l'on oublie vite cette encombrante référence. Tout le mal qu'on peut souhaiter à Patti cakes, c'est juste d’en suivre le chemin et de devenir à son tour un classique du genre.

MpM (Ecran noir)