E.T L'EXTRA TERRESTRE - Steven Spielberg

A PROPOS

Il y a toujours quelque chose d’étrange à revoir les films de son enfance, on ne sait jamais vraiment si l’émotion que l’on ressent est liée au film ou à la nostalgie des souvenirs de nos jeunes années. Une confusion peut-être encore plus marquée avec E.T., l’extra-terrestre, œuvre incomparablement culte du cinéma familial des années 80. Tellement représentative des divertissements estampillés Spielberg & co de cette époque, elle ne peut que faire remonter beaucoup de souvenirs à la surface chez les enfants de cette décennie (et même au-delà, tant l’aura de ces productions aura envahi durablement les écrans et marqué nombre de jeunes générations). Mais n’y aurait-il pas au sein même du film de Spielberg une magie particulière qui fait retomber chaque spectateur en enfance ?
E.T. bénéficie indubitablement de l’incroyable savoir-faire de Steven Spielberg en matière de divertissement grand public. Le réalisateur vient de sortir Les Aventuriers de l’Arche perdue qu’il a développé avec un autre pape de l’entertainment, Georges Lucas, et est donc déjà rodé au genre, qu’il ne cessera de produire par la suite dans les années 80 via sa société Amblin, née du succès d’E.T. Le film en suit la recette à la lettre, avec sa famille ordinaire qui va être transportée dans des aventures extraordinaires, lorsqu’Elliott, le cadet d’une fratrie de trois, va faire la rencontre d’un gentil extraterrestre égaré sur notre planète et poursuivi par les autorités américaines.
E.T. possède sa bonne dose d’action, un scénario plein de suspens, mais aussi beaucoup d’humour et surtout des personnages incroyablement attachants, caractéristiques majeures de ce cinéma, et qui font sa force. Dans ce premier film de Spielberg destiné à un public aussi jeune, le réalisateur aura également su apporter la touche nécessaire de magie et de poésie indispensable pour émerveiller un jeune public ou pour ramener les adultes en enfance. Comme tout divertissement pour enfants, E.T. délivre une jolie morale, ici celle de l’amitié, de la tolérance, du pacifisme et de l’ouverture à ce qui nous est étranger.
Pour autant, contrairement au cinéma pour enfants d’aujourd’hui, l’univers d’E.T. n’est pas aseptisé et jouit d’une certaine liberté de ton. On voit ainsi l’extraterrestre s’enfiler plusieurs bières lorsqu’il se retrouve seul à la maison, et son ivresse se répercuter sur Elliott (avec qui il est connecté), alors en classe. Le genre même de scène qu’on imagine difficilement dans une production actuelle. Autre témoignage d’une évolution des mœurs, lors de la ressortie du film pour son 20e anniversaire, entre autres retouches (notamment d’effets spéciaux), les armes des policiers poursuivant les enfants ont été remplacées par des talkies-walkies. Spielberg regrettera cependant fortement ces changements par la suite, la version la plus répandue actuellement reste donc la version initiale.
Spielberg a mis beaucoup de sa propre enfance dans E.T. Elliott, cet enfant souffrant de solitude après le divorce de ses parents, en quête d’amitié et passionné par les OVNI, c’est le réalisateur lui-même. Le film est ainsi bercé par une âme et une sincérité particulières, celles de Spielberg regardant sa propre enfance, ou plutôt retrouvant son regard d’alors. Le réalisateur se met en effet totalement à hauteur d’enfant pour raconter son histoire, ce qui donne toute sa force au film. Les adultes sont peu présents et s’apparentent le plus souvent à une menace dès qu’ils apparaissent. Seule la mère occupe une place plus importante, mais est souvent dépassée, et ne voit ni ne comprend ce qui se passe. Un peu à l’image du monde de Peter Pan (référence majeure et explicite du film), celui d’E.T. n’est donc que celui des enfants, et avant tout celui d’Elliott, garçon solitaire, coincé entre une petite sœur trop jeune, et un grand frère trop âgé. Ainsi, le personnage de l’extra-terrestre se confond avec ces amis imaginaires qu’aiment à s’inventer les enfants. Un effet fortement renforcé par le recourt à l’animatronique qui donne à E.T. l’apparence d’un jouet.
Le film de Steven Spielberg prend dès lors une envergure particulière, celle d’une aventure qui paraît née de l’imaginaire d’un enfant, le spectateur retombant alors, le temps d’un film, dans un immense jeu d’enfant, où les extraterrestres sont des êtres sympathiques venant d’univers lointains fantasmés. Les aliens se seraient plutôt les adultes qui ont perdus toute capacité à rêver et qui ne voient en l’inconnu qu’une menace.
Plus qu’un simple film générationnel, E.T., l’extra-terrestre s’impose ainsi comme l’un de films majeurs pour enfants et surtout sur l’enfance. Sorti à une époque bénie de l’entertainment (dont on ne cesse encore aujourd’hui de dupliquer la recette, le succès de Stranger Things en étant la preuve la plus flagrante), le film de Spielberg n’est cependant pas qu’un divertissement de très bonne qualité, mais bien également le témoignage de l’enfant qui sommeille encore dans l’âme de son auteur. Ce qui est particulièrement précieux.
Fabien Genestier (Le bleu du miroir)

Plans Kids
lundi 26 décembre 2022 à 13h15

à partir de 8 ans


E.T L'EXTRA TERRESTRE

de Steven Spielberg

Avec Dee Wallace-Stone, Henry Thomas, Peter Coyote
USA - 1982 - 2h00 - Version française

D'une petite navette spatiale, qui se pose au milieu d'une clairière en bordure de Los Angeles, descend un groupe d'extra-terrestres, envoyés sur terre. L'un d'eux est oublié au moment du départ et se retrouve seul sur cette planète qu'il ne connaît pas. Il va rencontrer un petit garçon et vivre une fabuleuse amitié...

A PROPOS

Il y a toujours quelque chose d’étrange à revoir les films de son enfance, on ne sait jamais vraiment si l’émotion que l’on ressent est liée au film ou à la nostalgie des souvenirs de nos jeunes années. Une confusion peut-être encore plus marquée avec E.T., l’extra-terrestre, œuvre incomparablement culte du cinéma familial des années 80. Tellement représentative des divertissements estampillés Spielberg & co de cette époque, elle ne peut que faire remonter beaucoup de souvenirs à la surface chez les enfants de cette décennie (et même au-delà, tant l’aura de ces productions aura envahi durablement les écrans et marqué nombre de jeunes générations). Mais n’y aurait-il pas au sein même du film de Spielberg une magie particulière qui fait retomber chaque spectateur en enfance ?
E.T. bénéficie indubitablement de l’incroyable savoir-faire de Steven Spielberg en matière de divertissement grand public. Le réalisateur vient de sortir Les Aventuriers de l’Arche perdue qu’il a développé avec un autre pape de l’entertainment, Georges Lucas, et est donc déjà rodé au genre, qu’il ne cessera de produire par la suite dans les années 80 via sa société Amblin, née du succès d’E.T. Le film en suit la recette à la lettre, avec sa famille ordinaire qui va être transportée dans des aventures extraordinaires, lorsqu’Elliott, le cadet d’une fratrie de trois, va faire la rencontre d’un gentil extraterrestre égaré sur notre planète et poursuivi par les autorités américaines.
E.T. possède sa bonne dose d’action, un scénario plein de suspens, mais aussi beaucoup d’humour et surtout des personnages incroyablement attachants, caractéristiques majeures de ce cinéma, et qui font sa force. Dans ce premier film de Spielberg destiné à un public aussi jeune, le réalisateur aura également su apporter la touche nécessaire de magie et de poésie indispensable pour émerveiller un jeune public ou pour ramener les adultes en enfance. Comme tout divertissement pour enfants, E.T. délivre une jolie morale, ici celle de l’amitié, de la tolérance, du pacifisme et de l’ouverture à ce qui nous est étranger.
Pour autant, contrairement au cinéma pour enfants d’aujourd’hui, l’univers d’E.T. n’est pas aseptisé et jouit d’une certaine liberté de ton. On voit ainsi l’extraterrestre s’enfiler plusieurs bières lorsqu’il se retrouve seul à la maison, et son ivresse se répercuter sur Elliott (avec qui il est connecté), alors en classe. Le genre même de scène qu’on imagine difficilement dans une production actuelle. Autre témoignage d’une évolution des mœurs, lors de la ressortie du film pour son 20e anniversaire, entre autres retouches (notamment d’effets spéciaux), les armes des policiers poursuivant les enfants ont été remplacées par des talkies-walkies. Spielberg regrettera cependant fortement ces changements par la suite, la version la plus répandue actuellement reste donc la version initiale.
Spielberg a mis beaucoup de sa propre enfance dans E.T. Elliott, cet enfant souffrant de solitude après le divorce de ses parents, en quête d’amitié et passionné par les OVNI, c’est le réalisateur lui-même. Le film est ainsi bercé par une âme et une sincérité particulières, celles de Spielberg regardant sa propre enfance, ou plutôt retrouvant son regard d’alors. Le réalisateur se met en effet totalement à hauteur d’enfant pour raconter son histoire, ce qui donne toute sa force au film. Les adultes sont peu présents et s’apparentent le plus souvent à une menace dès qu’ils apparaissent. Seule la mère occupe une place plus importante, mais est souvent dépassée, et ne voit ni ne comprend ce qui se passe. Un peu à l’image du monde de Peter Pan (référence majeure et explicite du film), celui d’E.T. n’est donc que celui des enfants, et avant tout celui d’Elliott, garçon solitaire, coincé entre une petite sœur trop jeune, et un grand frère trop âgé. Ainsi, le personnage de l’extra-terrestre se confond avec ces amis imaginaires qu’aiment à s’inventer les enfants. Un effet fortement renforcé par le recourt à l’animatronique qui donne à E.T. l’apparence d’un jouet.
Le film de Steven Spielberg prend dès lors une envergure particulière, celle d’une aventure qui paraît née de l’imaginaire d’un enfant, le spectateur retombant alors, le temps d’un film, dans un immense jeu d’enfant, où les extraterrestres sont des êtres sympathiques venant d’univers lointains fantasmés. Les aliens se seraient plutôt les adultes qui ont perdus toute capacité à rêver et qui ne voient en l’inconnu qu’une menace.
Plus qu’un simple film générationnel, E.T., l’extra-terrestre s’impose ainsi comme l’un de films majeurs pour enfants et surtout sur l’enfance. Sorti à une époque bénie de l’entertainment (dont on ne cesse encore aujourd’hui de dupliquer la recette, le succès de Stranger Things en étant la preuve la plus flagrante), le film de Spielberg n’est cependant pas qu’un divertissement de très bonne qualité, mais bien également le témoignage de l’enfant qui sommeille encore dans l’âme de son auteur. Ce qui est particulièrement précieux.
Fabien Genestier (Le bleu du miroir)