R - Tobias Lindholm & Michael Noer

A PROPOS

Les deux réalisateurs danois à la barre de R sont pour ainsi dire déjà fichés de nos services. Ils ont en effet livré chacun de leur côté deux films qui ont excellé en 2013 : Hijacking pour Tobias Lindholm et Northwest pour Michael Noer. Le cinéma nordique vient sans doute de se trouver une relève de choix, mais attention, pas n’importe laquelle. On parle ici de celle capable de tenir la dragée haute aux Nicolas Winding Refn (la trilogie Pusher, Bronson, Drive, Only God Forgives) et autres Niels Arden Oplev (Millénium). A même pas 40 ans les deux cinéastes semblent encore avoir des idées à revendre et toute la vie devant eux pour continuer à nous surprendre.

Pour en revenir à R, rappelons que sa production date de 2010 et qu’il a donc été tourné avant Hijacking et Northwest. Il gagne probablement une sortie en salles chez nous grâce au succès critique de ces deux films. Cette collaboration à la réalisation et au scénario entre les deux artistes vise à dépeindre l’univers carcéral moderne de leur pays, le Danemark. La caméra s’enferme très rapidement avec les détenus sur une bande sonore atmosphérique des plus pesantes. Elle n’en sortira plus. Rune (Pilou Asbaek), un jeune criminel tout juste incarcéré devra très vite se soumettre à la brutalité des lieux. La jeune brebis égarée est alors lâchée au milieu d’une meute de loups sanguinaires avides de chair fraîche. Le décor est planté, Rune devient un étranger dans une communauté où seuls les rapports de force comptent. Isolé et donc extrêmement vulnérable, il va devoir faire profil bas et jouer les larbins pour les autres détenus. Le jour où il parvient à mettre en place un trafic avec Rachid qu’il rencontre lors de son travail en cuisine va changer la donne, mais pour combien de temps ?

Le niveau de réalisme atteint par les auteurs subjugue jusqu’à ébranler le spectateur tel un bon uppercut. La sensation d’authenticité est d’autant plus prégnante que le tournage a eu lieu dans l’enceinte d’une vraie prison, quant aux acteurs, il s’agit pour la plupart d’anciens détenus. L’interprétation est d’ailleurs sans faille, quelques regards nous en disent ici parfois bien plus que des mots. Contrairement à d’autres films qui prennent pour cadre les prisons, point de tentatives d’évasion, de matons tortionnaires et de pamphlet sur la peine de mort ou l’administration pénitentiaire. Nous sommes plus proches de Un prophète et Felon que de L’évadé d’Alcatraz. Le seul but est de survivre à l’intérieur d’une micro-société ultra violente régie par ses propres codes. Comme dans Northwest, les portes de sortie sont minces, voire inexistantes, ce qui est renforcé par une structure narrative originale en forme de passage de témoin. Ici, les personnages les plus vulnérables cherchent désespérément une issue aux allures de chimère. Le sentiment nihiliste est ancré si profondément qu’il déstabilise. R apparaît alors comme un miroir dans lequel se reflète l’état des lieux de la morosité actuelle de notre société. On tient là un véritable coup de poing à l’estomac qui est, n’ayons pas peur de le dire, tout simplement le meilleur film de prison que l’on ait pu voir depuis Un prophète de Jacques Audiard.

Pierre Vedral (avoiralire.com)

Soirée rencontre
jeudi 9 mai 2019 à 20h00

en présence de Maitre Anne-Pascale Lamy-Rabu, avocate au barreau d'Angers et Anne-Laure Maduraud, magistrate en décharge syndicale

Soirée organisée en collaboration avec GENEPI Angers


R

de Tobias Lindholm & Michael Noer

avec Pilou Asbæk, Dulfi Al-Jabouri, Roland Møller
DANEMARK - 2010 - 1h39 - VOST

Rune est un jeune criminel qui vient d’arriver en prison. Il découvre ce nouveau monde régi par les codes et les missions à exécuter. Réduit à néant, il n’est désormais qu’un numéro, que la lettre R. Dans sa quête de survie, il rencontre Rachid, un jeune musulman, avec lequel il met en place un trafic qui lui permet d’être désormais respecté. Mais leur réussite suscite la convoitise d’autres détenus, qui ne tarderont pas à leur faire savoir.
https://www.kmbofilms.com/r

A PROPOS

Les deux réalisateurs danois à la barre de R sont pour ainsi dire déjà fichés de nos services. Ils ont en effet livré chacun de leur côté deux films qui ont excellé en 2013 : Hijacking pour Tobias Lindholm et Northwest pour Michael Noer. Le cinéma nordique vient sans doute de se trouver une relève de choix, mais attention, pas n’importe laquelle. On parle ici de celle capable de tenir la dragée haute aux Nicolas Winding Refn (la trilogie Pusher, Bronson, Drive, Only God Forgives) et autres Niels Arden Oplev (Millénium). A même pas 40 ans les deux cinéastes semblent encore avoir des idées à revendre et toute la vie devant eux pour continuer à nous surprendre.

Pour en revenir à R, rappelons que sa production date de 2010 et qu’il a donc été tourné avant Hijacking et Northwest. Il gagne probablement une sortie en salles chez nous grâce au succès critique de ces deux films. Cette collaboration à la réalisation et au scénario entre les deux artistes vise à dépeindre l’univers carcéral moderne de leur pays, le Danemark. La caméra s’enferme très rapidement avec les détenus sur une bande sonore atmosphérique des plus pesantes. Elle n’en sortira plus. Rune (Pilou Asbaek), un jeune criminel tout juste incarcéré devra très vite se soumettre à la brutalité des lieux. La jeune brebis égarée est alors lâchée au milieu d’une meute de loups sanguinaires avides de chair fraîche. Le décor est planté, Rune devient un étranger dans une communauté où seuls les rapports de force comptent. Isolé et donc extrêmement vulnérable, il va devoir faire profil bas et jouer les larbins pour les autres détenus. Le jour où il parvient à mettre en place un trafic avec Rachid qu’il rencontre lors de son travail en cuisine va changer la donne, mais pour combien de temps ?

Le niveau de réalisme atteint par les auteurs subjugue jusqu’à ébranler le spectateur tel un bon uppercut. La sensation d’authenticité est d’autant plus prégnante que le tournage a eu lieu dans l’enceinte d’une vraie prison, quant aux acteurs, il s’agit pour la plupart d’anciens détenus. L’interprétation est d’ailleurs sans faille, quelques regards nous en disent ici parfois bien plus que des mots. Contrairement à d’autres films qui prennent pour cadre les prisons, point de tentatives d’évasion, de matons tortionnaires et de pamphlet sur la peine de mort ou l’administration pénitentiaire. Nous sommes plus proches de Un prophète et Felon que de L’évadé d’Alcatraz. Le seul but est de survivre à l’intérieur d’une micro-société ultra violente régie par ses propres codes. Comme dans Northwest, les portes de sortie sont minces, voire inexistantes, ce qui est renforcé par une structure narrative originale en forme de passage de témoin. Ici, les personnages les plus vulnérables cherchent désespérément une issue aux allures de chimère. Le sentiment nihiliste est ancré si profondément qu’il déstabilise. R apparaît alors comme un miroir dans lequel se reflète l’état des lieux de la morosité actuelle de notre société. On tient là un véritable coup de poing à l’estomac qui est, n’ayons pas peur de le dire, tout simplement le meilleur film de prison que l’on ait pu voir depuis Un prophète de Jacques Audiard.

Pierre Vedral (avoiralire.com)