ÉVÉNEMENTS ET SÉANCES SPECIALES

JE VERRAI TOUJOURS VOS VISAGES - Soirée Rencontre - 2024-03-21

Soirée Rencontre - jeudi 21 mars à 20h00

JE VERRAI TOUJOURS VOS VISAGES de Jeanne Herry

PRIMADONNA - Ciné fac - 2024-03-21

Ciné fac - jeudi 21 mars à 20h00

PRIMADONNA de Marta Savina

IL RESTE ENCORE DEMAIN - Ciné Cosy - 2024-03-22

Ciné Cosy - vendredi 22 mars à 13h15

IL RESTE ENCORE DEMAIN de de Paola Cortellesi

20 000 ESPÈCES D'ABEILLES - Soirée rencontre - 2024-03-25

Soirée rencontre - lundi 25 mars à 20h00

20 000 ESPÈCES D'ABEILLES de Estibaliz Urresola Solaguren

LA FORÊT C'EST LA CLASSE ! - Ciné Doc - 2024-03-26

Ciné Doc - mardi 26 mars à 20h00

LA FORÊT C'EST LA CLASSE ! de Daniel Schlosser

UNE ÎLE DE DANSE - Festival Conversations CNDC - 2024-03-27

Festival Conversations CNDC - mercredi 27 mars à 20h00

UNE ÎLE DE DANSE de Yvann Alexandre et Doria Belanger

LES LUEURS D'ADEN - Soirée Rencontre - 2024-04-02

Soirée Rencontre - mardi 02 avril à 20h00

LES LUEURS D'ADEN de Amr Gamal

LE MUR QUI NOUS SÉPARE - Ciné Fac - 2024-04-04

Ciné Fac - jeudi 04 avril à 20h00

LE MUR QUI NOUS SÉPARE de Norbert Lechner

L'INCOMPRIS - Soirée Rencontre - 2024-04-04

Soirée Rencontre - jeudi 04 avril à 20h00

L'INCOMPRIS de Luigi Comencini

ALICE DANS LES VILLES - Ciné classique - 2024-04-07

Ciné classique - dimanche 07 avril à 17h45

ALICE DANS LES VILLES de Wim Wenders

PROMISED LAND - Soirée CinéConf - 2024-04-11

Soirée CinéConf - jeudi 11 avril à 20h00

PROMISED LAND de Gus Van Sant

BLUE GIANT - Ciné Manga - 2024-04-15

Ciné Manga - lundi 15 avril à 20h00

BLUE GIANT de Yuzuru Tachikawa

GHOST DOG : LA VOIE DU SAMOURAÏ - Plans Cultes - 2024-04-16

Plans Cultes - mardi 16 avril à 20h00

GHOST DOG : LA VOIE DU SAMOURAÏ de Jim Jarmusch

UN HOMME D'EXCEPTION - Ciné Rencontre - 2024-04-22

Ciné Rencontre - lundi 22 avril à 20h00

UN HOMME D'EXCEPTION de Ron Howard

CASINO - Plans Cultes - 2024-05-14

Plans Cultes - mardi 14 mai à 20h00

CASINO de Martin Scorsese

LOLA, UNE FEMME ALLEMANDE - Rainer Werner Fassbinder

A PROPOS

Après le succès du Mariage de Maria Braun et la fâcherie avec Hanna Schygulla, Fassbinder accepte de tourner un remake de L’ange bleu, qu’il transpose dans les années 50. Mais évidemment, Lola s’écarte de son modèle et devient un film de son auteur, l’un des plus stylisés avec Querelle, c’est-à-dire l’un des plus irréalistes. Le traitement de la lumière et de la couleur, anti-naturels, sert non pas à décrire un cadre mais à le réinventer selon les besoins narratifs. Ainsi les personnages peuvent-ils être dans le même espace mais dans une tonalité différente : côte à côte dans la voiture, Lola est rose et von Bohm bleu.
Il y a certes une explication plausible à ce déferlement de couleurs, puisqu’une partie du film se passe dans un bordel aux éclairages variés. Mais ce lieu central, le refoulé d’une société, contamine les autres intérieurs, de la chambre bariolée de Lola au bureau-aquarium de von Bohm. Pur entre les purs, ce dernier reçoit une lumière artificielle qui illumine ses yeux. Selon le vieil adage de Fassbinder, il faut montrer le faux pour arriver au vrai.
Lola est une prostituée chanteuse, vulgaire et agressive, qui, au début, se plaint de ce que la poésie soit toujours triste. Sur un défi, elle entreprend la conquête du nouveau directeur des travaux publics, aussi rigide sur ses principes professionnels que sur la morale. Autour de ce saint qui va tomber, les « notables », corrompus, font la loi ou s’en arrangent. C’est que le pays est en reconstruction et en expansion, comme le serine le sinistre Schuckert, protecteur et amant de Lola ; et les profits à venir font saliver tous ces personnages méprisants (voir la séquence du repas avec la gouvernante). Du point de vue symbolique, Schuckert pourrait représenter un capitalisme rapace et cynique qui « donne ici, donne là », prêt à arroser tout le monde. La libre entreprise devient reine, ignorant la morale et les syndicats. von Bohm lui-même n’y pourra résister et le projet immobilier qu’il refusait aura son accord, alors qu’il se marie avec Lola, abdiquant tous ses principes. Ainsi, le capitalisme avale et digère son opposition, et ce ne sont pas quelques syndiqués avec leurs pancartes pathétiques qui influeront sur lui. Devenu conforme, von Bohm peut épouser Lola, c’est-à-dire l’Allemagne, même si elle n’est qu’une putain qui a dans sa corbeille de mariée un bordel. Peut-on mener réflexion plus amère sur le passé de son pays ? Passé dont on s’efforce de gommer la réalité en inaugurant une statue au nom des soldats allemands, qui n’étaient pas tous nazis…
Lola est un film politique, sans aucun doute, c’est aussi une manière de pastiche des grands mélodrames (les clins d’œil à Sirk, notamment avec la livraison de la télévision) plus rutilant, voire kitsch, mais d’un kitsch assumé. Fassbinder y glorifie l’excès (de couleurs, de lumières, de sentiments, de sons) en brassant des thèmes attendus à sa manière, soit des miroirs, des sur-cadrages, des caches dans le cadre, des travellings circulaires, tout son arsenal qui est à la fois une signature et une vision, une manière d’appréhender le monde des apparences, de la dissimulation et de l’enfermement. Il glisse aussi des allusions à d’autres films : ainsi le faux aveugle vient-il de Roulette chinoise, comme les poupées ; le générique et la mère veuve du Mariage de Maria Braun. Quant à la dernière phrase, « je suis heureux », elle rappelle le carton initial de Tous les autres s’appellent Ali. Unité et cohérence d’une œuvre majeure, qui trouve dans Lola l’une de ses incarnations les plus abouties et les plus intransigeantes.

François Bonini (avoiralire.com)

Ciné classique
dimanche 24 mars 2019 à 17h45

présenté par Andrea Brünig, maîtresse de conférences au département d'Allemand à l'université d'Angers

Soirée organisée en collaboration avec l'Université d'Angers et Cinéma Parlant dans le cadre de la semaine de cinéma de langue allemande


LOLA, UNE FEMME ALLEMANDE

de Rainer Werner Fassbinder

avec Mario Adorf, Barbara Sukowa, Armin Mueller-Stahl
ALLEMAGNE - 1981 - 1h55 - VOST

À la fin des années 1950, dans une petite ville de Bavière, l'affrontement entre l'urbaniste Bohm et Schuckert, l'entrepreneur qui gère tous les chantiers de la ville, enrichi grâce au marché noir de l'après-guerre. Entre les deux hommes, la question du bien public, la morale de l'argent et du « boom économique » et… Lola, prostituée et strip-teaseuse à la Villa Fink…
http://www.carlottavod.com/lola-une-femme-allemande

A PROPOS

Après le succès du Mariage de Maria Braun et la fâcherie avec Hanna Schygulla, Fassbinder accepte de tourner un remake de L’ange bleu, qu’il transpose dans les années 50. Mais évidemment, Lola s’écarte de son modèle et devient un film de son auteur, l’un des plus stylisés avec Querelle, c’est-à-dire l’un des plus irréalistes. Le traitement de la lumière et de la couleur, anti-naturels, sert non pas à décrire un cadre mais à le réinventer selon les besoins narratifs. Ainsi les personnages peuvent-ils être dans le même espace mais dans une tonalité différente : côte à côte dans la voiture, Lola est rose et von Bohm bleu.
Il y a certes une explication plausible à ce déferlement de couleurs, puisqu’une partie du film se passe dans un bordel aux éclairages variés. Mais ce lieu central, le refoulé d’une société, contamine les autres intérieurs, de la chambre bariolée de Lola au bureau-aquarium de von Bohm. Pur entre les purs, ce dernier reçoit une lumière artificielle qui illumine ses yeux. Selon le vieil adage de Fassbinder, il faut montrer le faux pour arriver au vrai.
Lola est une prostituée chanteuse, vulgaire et agressive, qui, au début, se plaint de ce que la poésie soit toujours triste. Sur un défi, elle entreprend la conquête du nouveau directeur des travaux publics, aussi rigide sur ses principes professionnels que sur la morale. Autour de ce saint qui va tomber, les « notables », corrompus, font la loi ou s’en arrangent. C’est que le pays est en reconstruction et en expansion, comme le serine le sinistre Schuckert, protecteur et amant de Lola ; et les profits à venir font saliver tous ces personnages méprisants (voir la séquence du repas avec la gouvernante). Du point de vue symbolique, Schuckert pourrait représenter un capitalisme rapace et cynique qui « donne ici, donne là », prêt à arroser tout le monde. La libre entreprise devient reine, ignorant la morale et les syndicats. von Bohm lui-même n’y pourra résister et le projet immobilier qu’il refusait aura son accord, alors qu’il se marie avec Lola, abdiquant tous ses principes. Ainsi, le capitalisme avale et digère son opposition, et ce ne sont pas quelques syndiqués avec leurs pancartes pathétiques qui influeront sur lui. Devenu conforme, von Bohm peut épouser Lola, c’est-à-dire l’Allemagne, même si elle n’est qu’une putain qui a dans sa corbeille de mariée un bordel. Peut-on mener réflexion plus amère sur le passé de son pays ? Passé dont on s’efforce de gommer la réalité en inaugurant une statue au nom des soldats allemands, qui n’étaient pas tous nazis…
Lola est un film politique, sans aucun doute, c’est aussi une manière de pastiche des grands mélodrames (les clins d’œil à Sirk, notamment avec la livraison de la télévision) plus rutilant, voire kitsch, mais d’un kitsch assumé. Fassbinder y glorifie l’excès (de couleurs, de lumières, de sentiments, de sons) en brassant des thèmes attendus à sa manière, soit des miroirs, des sur-cadrages, des caches dans le cadre, des travellings circulaires, tout son arsenal qui est à la fois une signature et une vision, une manière d’appréhender le monde des apparences, de la dissimulation et de l’enfermement. Il glisse aussi des allusions à d’autres films : ainsi le faux aveugle vient-il de Roulette chinoise, comme les poupées ; le générique et la mère veuve du Mariage de Maria Braun. Quant à la dernière phrase, « je suis heureux », elle rappelle le carton initial de Tous les autres s’appellent Ali. Unité et cohérence d’une œuvre majeure, qui trouve dans Lola l’une de ses incarnations les plus abouties et les plus intransigeantes.

François Bonini (avoiralire.com)