L'ACADÉMIE DES MUSES - José Luis Guerín

A PROPOS

L’analyse de l’amour, de la poésie classique à la vie d’un prof de fac entouré d’étudiantes admiratives. Séduisant.

Cela commence par cet avant-titre : “Une expérience pédagogique du professeur Raffaele Pinto filmée par J. L. Guerin”. Une annonce qui est un peu un piège. Si le professeur Pinto est un authentique professeur de philologie italienne enseignant à l’université de Barcelone – où une grande partie du film a été tourné –, ce qu’il déclenche lors de ses cours animés, suivis avec passion par des disciples assidues, sera fictivement concrétisé dans une deuxième partie. Une histoire d’incarnation, de transformation du verbe en chair, mais aussi de visages et de voix.

Dès les premières minutes, le tableau des physionomies attentives et épanouies des élèves assistant au cours rappelle que José Luis Guerin a un grand sens de la beauté. Le sentiment de beauté étant, selon Pinto, “le fondement des valeurs de la civilisation”. Et le rôle des muses, dont il sera essentiellement question, est justement de “convertir les hommes à la cause du Beau” (par l’amour qu’elles leur inspirent).

A travers Pinto, qui, en détaillant certains processus de La Divine Comédie de Dante, donne du grain à moudre à ses propres muses, Guerin reprend sa propre quête de l’idéal féminin amorcée dans sa docufiction onirique Dans la ville de Sylvia.

En infiniment plus bavard certes, puisque ici le moteur du film est le séduisant discours du prof sur la séduction amoureuse. L’enjeu est donc, en dehors de quelques intrigues parallèles juste évoquées, voire virtuelles (une élève entretient une correspondance épistolaire sur internet), le rapport du philologue avec ses groupies, pour parler vulgairement.

Par son discours (intellectuellement) émoustillant sur la poésie et sa fonction mystico-profane, l’enseignant s’avère lui-même un enjôleur. Sa propre épouse en est d’ailleurs fort marrie. Le film est divisé entre théorie (le cours) et pratique (le voyage). On retrouve Pinto en Italie, tour à tour avec deux de ses élèves, Manuela et Mireia.

Là, le discours ex-cathedra va s’affronter au réel. Cette partie semi-fictive, tournée parmi les bergers sardes, dont les chants archaïques et gutturaux font vibrer Manuela, puis à Naples, où Mireia fait une escapade avec le prof, est peu mise en scène, à peine fictionnée.

Cette “comédie des muses” joliment peuplée charme par son exploration piquante des origines de l’amour dans la littérature du XIVe siècle. Elle captive ensuite en tentant d’appliquer cet idéal poétique au monde réel et actuel. Guerin nous rappelle l’immense pouvoir de l’illusion (amoureuse).

Vincent Ostria (Les Inrocks)

Ciné découverte
dimanche 26 mars 2017 à 11h00

Tarif unique  : 4.80

Séance organisée en collaboration avec l'Université d'Angers, le CDDP 49 et Cinéma Parlant dans le cadre de la semaine de cinéma de langue espagnole


L'ACADÉMIE DES MUSES

de José Luis Guerín

avec Raffaele Pinto, Emanuela Forgetta, Rosa Delor Muns
ESPAGNE - 2015 - 1h32 - VOST

L'amphithéâtre d'une université de Lettres.
Un professeur de philologie distille des cours de poésie à une assistance étudiante composée principalement de visages féminins. À ce projet pédagogique qui convoque les muses de l'Antiquité pour dresser une éthique poétique et amoureuse, les étudiantes se prêtent petit à petit, avec vertige et passion, au jeu d'une académie des muses bel et bien incarnée.
Projet utopique? Invraisemblable ? Controversé ? Se succèdent des jeux de miroirs et de pouvoirs, de séduction et de désirs, où chacun joue son rôle, où le faux s'acoquine avec le vrai, où badinage amoureux et satire se conjuguent avec délice, sous les auspices de Dante, Lancelot et Guenièvre, Orphée et Eurydice. 
https://www.facebook.com/laacademiadelasmusas/

A PROPOS

L’analyse de l’amour, de la poésie classique à la vie d’un prof de fac entouré d’étudiantes admiratives. Séduisant.

Cela commence par cet avant-titre : “Une expérience pédagogique du professeur Raffaele Pinto filmée par J. L. Guerin”. Une annonce qui est un peu un piège. Si le professeur Pinto est un authentique professeur de philologie italienne enseignant à l’université de Barcelone – où une grande partie du film a été tourné –, ce qu’il déclenche lors de ses cours animés, suivis avec passion par des disciples assidues, sera fictivement concrétisé dans une deuxième partie. Une histoire d’incarnation, de transformation du verbe en chair, mais aussi de visages et de voix.

Dès les premières minutes, le tableau des physionomies attentives et épanouies des élèves assistant au cours rappelle que José Luis Guerin a un grand sens de la beauté. Le sentiment de beauté étant, selon Pinto, “le fondement des valeurs de la civilisation”. Et le rôle des muses, dont il sera essentiellement question, est justement de “convertir les hommes à la cause du Beau” (par l’amour qu’elles leur inspirent).

A travers Pinto, qui, en détaillant certains processus de La Divine Comédie de Dante, donne du grain à moudre à ses propres muses, Guerin reprend sa propre quête de l’idéal féminin amorcée dans sa docufiction onirique Dans la ville de Sylvia.

En infiniment plus bavard certes, puisque ici le moteur du film est le séduisant discours du prof sur la séduction amoureuse. L’enjeu est donc, en dehors de quelques intrigues parallèles juste évoquées, voire virtuelles (une élève entretient une correspondance épistolaire sur internet), le rapport du philologue avec ses groupies, pour parler vulgairement.

Par son discours (intellectuellement) émoustillant sur la poésie et sa fonction mystico-profane, l’enseignant s’avère lui-même un enjôleur. Sa propre épouse en est d’ailleurs fort marrie. Le film est divisé entre théorie (le cours) et pratique (le voyage). On retrouve Pinto en Italie, tour à tour avec deux de ses élèves, Manuela et Mireia.

Là, le discours ex-cathedra va s’affronter au réel. Cette partie semi-fictive, tournée parmi les bergers sardes, dont les chants archaïques et gutturaux font vibrer Manuela, puis à Naples, où Mireia fait une escapade avec le prof, est peu mise en scène, à peine fictionnée.

Cette “comédie des muses” joliment peuplée charme par son exploration piquante des origines de l’amour dans la littérature du XIVe siècle. Elle captive ensuite en tentant d’appliquer cet idéal poétique au monde réel et actuel. Guerin nous rappelle l’immense pouvoir de l’illusion (amoureuse).

Vincent Ostria (Les Inrocks)