COMME DES LIONS - Francoise Davisse

A PROPOS

«Il y a plus d’intelligence dans 200 têtes que dans une seule, c’est mathématique.» C’est Philippe Julien, secrétaire de la CGT de l’usine PSA (Peugeot-Citroën) d’Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis) qui prononce cette phrase au cours d’une assemblée. C’est au début du film, aux débuts de la lutte des salariés de l’usine d’Aulnay, au moment de l’annonce de sa fermeture par la direction.

Avenir.
A quoi sert un film ? Comme des lions, de Françoise Davisse, sert à être vu par le plus grand nombre de personnes possibles. C’est un film-multiplication. Et pas un film-addition, qui serait soit celui des patrons (addition de chiffres : une page de comptabilité), soit celui de la télévision (addition de spectateurs : une page de publicité). Deux cents personnes dans une assemblée, c’est deux cent fois plus d’intelligence.

Deux cents personnes dans une salle de cinéma, aussi. Rien ne s’additionne, mais tout se multiplie. Comme des lions a une mathématique bien à lui, une mathématique de cinéma. Il fait un grand mouvement : des chiffres au texte, et du texte aux images et aux sons, et des images et des sons à l’avenir.

Solidarité.
D’abord, les chiffres ne collent pas : en 2010, le groupe PSA vend plus de voitures que jamais au cours de son histoire ; en 2011, un plan de la direction décide que les 3 000 salariés de l’usine d’Aulnay devront quitter leur travail, obligés d’en changer ou d’en chercher ailleurs. La direction se dissimule derrière des séries de communiqués que le film reproduit par des cartons, du texte sur fond noir, sans visage et sans image. Les ouvriers, dont certains sont syndiqués, deviennent des grévistes, qui deviennent des héros. Déjà ça se multiplie beaucoup : en paroles, en visages, en actions. Enfin, il y a l’avenir : incertain, mais pas condamné, pas inéluctable, et le film va vers l’avenir en nous faisant suivre très précisément les étapes qui pourraient le changer. Ce qui est beau, c’est que le mouvement du film va dans les deux sens : l’avenir peut être changé, les chiffres muets et le texte aveugle peuvent être changés par les images et les sons, par la lutte des grévistes, par les paroles et par les regards. Certes, les chiffres du profit dictent les communiqués qui dictent la vie des salariés et leur avenir, mais le mouvement peut être inversé.

On peut donc penser que si tout le monde voyait ce film, et s’en parlait, tout l’avenir pourrait être changé. «C’est mathématique.» C’est excitant, comme un bon film. C’est peut-être pour ces raisons qu’une autre mathématique, celle de l’addition, aimerait ces temps-ci empêcher les têtes de se multiplier : dans les usines, dans les universités, dans les pays, dans les cinémas. On pourrait finir par devenir plus intelligents. Un film par exemple nous apprend que les ouvriers de l’usine PSA d’Aulnay ont récolté 900 000 euros dans la caisse de solidarité avec leur grève. Et ce n’est pas le chiffre qui compte, c’est l’avenir de ce chiffre, c’est le mouvement.
Luc Chessel (Libération)

Ciné Doc
mardi 18 octobre 2016 à 20h15

en présence de Philippe Julien, délégué CGT à PSA Aulnay

Soirée organisée en collaboration avec la commission culturelle de l'union locale CGT d'Angers


COMME DES LIONS

de Francoise Davisse

Documentaire
France - 2015 - 1h55

Comme des lions raconte deux ans d’engagement de salariés de PSA Aulnay, contre la fermeture de leur usine qui, en 2013, emploie encore plus de 3 000 personnes dont près de 400 intérimaires.

Des immigrés, des enfants d’immigrés, des militants, bref des ouvriers du 93 se sont découverts experts et décideurs. Ces salariés ont mis à jour les mensonges de la direction, les faux prétextes, les promesses sans garanties, les raisons de la faiblesse de l’état. Bien sur ils n’ont pas « gagné ». Mais peut être faut-il arrêter de tout penser en terme de « gain ». La vie est faite d’expériences, de risques, d’aventure et de fierté.

Et là, ces deux ans sont une tranche de vie exceptionnelle. Un moment d’intelligence collective, de démocratie et de révélations.
http://www.commedeslions-lefilm.com/

A PROPOS

«Il y a plus d’intelligence dans 200 têtes que dans une seule, c’est mathématique.» C’est Philippe Julien, secrétaire de la CGT de l’usine PSA (Peugeot-Citroën) d’Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis) qui prononce cette phrase au cours d’une assemblée. C’est au début du film, aux débuts de la lutte des salariés de l’usine d’Aulnay, au moment de l’annonce de sa fermeture par la direction.

Avenir.
A quoi sert un film ? Comme des lions, de Françoise Davisse, sert à être vu par le plus grand nombre de personnes possibles. C’est un film-multiplication. Et pas un film-addition, qui serait soit celui des patrons (addition de chiffres : une page de comptabilité), soit celui de la télévision (addition de spectateurs : une page de publicité). Deux cents personnes dans une assemblée, c’est deux cent fois plus d’intelligence.

Deux cents personnes dans une salle de cinéma, aussi. Rien ne s’additionne, mais tout se multiplie. Comme des lions a une mathématique bien à lui, une mathématique de cinéma. Il fait un grand mouvement : des chiffres au texte, et du texte aux images et aux sons, et des images et des sons à l’avenir.

Solidarité.
D’abord, les chiffres ne collent pas : en 2010, le groupe PSA vend plus de voitures que jamais au cours de son histoire ; en 2011, un plan de la direction décide que les 3 000 salariés de l’usine d’Aulnay devront quitter leur travail, obligés d’en changer ou d’en chercher ailleurs. La direction se dissimule derrière des séries de communiqués que le film reproduit par des cartons, du texte sur fond noir, sans visage et sans image. Les ouvriers, dont certains sont syndiqués, deviennent des grévistes, qui deviennent des héros. Déjà ça se multiplie beaucoup : en paroles, en visages, en actions. Enfin, il y a l’avenir : incertain, mais pas condamné, pas inéluctable, et le film va vers l’avenir en nous faisant suivre très précisément les étapes qui pourraient le changer. Ce qui est beau, c’est que le mouvement du film va dans les deux sens : l’avenir peut être changé, les chiffres muets et le texte aveugle peuvent être changés par les images et les sons, par la lutte des grévistes, par les paroles et par les regards. Certes, les chiffres du profit dictent les communiqués qui dictent la vie des salariés et leur avenir, mais le mouvement peut être inversé.

On peut donc penser que si tout le monde voyait ce film, et s’en parlait, tout l’avenir pourrait être changé. «C’est mathématique.» C’est excitant, comme un bon film. C’est peut-être pour ces raisons qu’une autre mathématique, celle de l’addition, aimerait ces temps-ci empêcher les têtes de se multiplier : dans les usines, dans les universités, dans les pays, dans les cinémas. On pourrait finir par devenir plus intelligents. Un film par exemple nous apprend que les ouvriers de l’usine PSA d’Aulnay ont récolté 900 000 euros dans la caisse de solidarité avec leur grève. Et ce n’est pas le chiffre qui compte, c’est l’avenir de ce chiffre, c’est le mouvement.
Luc Chessel (Libération)